La société civile est d’abord une société :
La société est civile lorsqu’elle a une activité civile et qu’elle ne correspond pas à une société à laquelle la loi confère le caractère commercial en raison de sa forme ou de son objet (C. civ. art. 1845, al. 2).
Il existe trois grands type de sociétés civiles comprenant chacune différentes sous formes de sociétés civiles.
Sociétés civiles à objet immobilier
Sociétés civiles immobilières de location (SCI)
Les sociétés civiles immobilières de location – dénommées également « société civile de gestion patrimoniale » – ont essentiellement pour objet la gestion et la location d’immeubles (bâtis ou non bâtis).
La société peut avoir pour objet de gérer un ou plusieurs immeubles qui lui ont été apportés directement (en propriété ou en jouissance) par ses associés.
Mais l’objet de ces sociétés consiste le plus souvent à rassembler des fonds (apports en espèces des associés) pour acquérir directement des immeubles de rapport ou pour faire construire ces derniers en vue de les louer.
Ce type de société – appelé dans le langage courant « société civile immobilière » (SCI) – connaît un grand succès.
Il présente l’avantage de permettre à plusieurs personnes de réaliser ensemble des placements immobiliers qu’elles ne pourraient entreprendre isolément. Il permet aussi d’éviter le démembrement d’un patrimoine foncier lorsque la personne qui a constitué ce patrimoine vient à décéder en laissant plusieurs héritiers. Ces derniers ne peuvent pas, en effet, demander le partage en nature du ou des immeubles composant ce patrimoine puisque leurs droits successoraux portent, non pas sur ces immeubles, mais sur les parts du défunt dans la société civile propriétaire.
La SCI est la queen des sociétés civiles si bien que beaucoup confondent société civile et société civile immobilière. La SCI est une société civile mais toute société civile n’est pas une SCI.
Sociétés civiles de placement immobilier (SCPI)
Les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) sont des sociétés d’investissement collectif ayant pour objet l’acquisition et la gestion d’un patrimoine immobilier locatif grâce à l’émission de parts dans le public. Cette forme sociale connaît un succès mitigé car les parts de SCPI présentent l’inconvénient pour les investisseurs d’être difficiles à céder. En 2022, il existait 215 SCPI contre 209 en 2021 (source : Association française des sociétés de placement immobilier).
Le choix du statut civil pour ces sociétés s’explique essentiellement par des raisons fiscales puisqu’il leur permet de ne pas être assujetties à l’impôt sur les sociétés.
Ces sociétés sont régies par les articles L 214-86 à L 214-118 et R 214-130 à R 214-160 du Code monétaire et financier et, pour les dispositions comptables, par l’arrêté ECOT9526139A du 26 avril 1995 et par le règlement ANC 2016-03 du 15 avril 2016, relatif aux règles comptables applicables aux SCPI.
Les dispositions précitées du Code monétaire et financier reprennent les règles des sociétés civiles en les aménageant par de larges emprunts aux règles concernant les sociétés anonymes en vue d’assurer une meilleure protection des associés.
Comme toute société civile, les SCPI sont tenues de se conformer aux règles générales des articles 1845 à 1870-1 du Code civil, à moins qu’il n’y soit dérogé par leur statut particulier.
Les SCPI entrent dans la catégorie des fonds d’investissement alternatifs (FIA) ouverts aux investisseurs non professionnels (C. mon. fin. art. L 214-24, II). À ce titre, la SCPI ou sa société de gestion doit veiller à désigner un dépositaire à qui est confiée la garde de ses actifs.
Le dépositaire est soumis aux dispositions des articles L 214-24-3 s. et D 214-32-4-2 du Code monétaire et financier. Ses missions et son organisation sont précisées aux articles 323-23-A s. du règlement général de l’AMF.
Les SCPI ont pour objet (C. mon. fin. art. L 214-114, al. 1 et 2) :
- l’acquisition directe ou indirecte, y compris en l’état futur d’achèvement, et la gestion d’un patrimoine immobilier affecté à la location, qu’il s’agisse d’immeubles à usage d’habitation ou à usage commercial ;
- l’acquisition et la gestion d’immeubles qu’elles font construire exclusivement en vue de leur location.
Sociétés civiles d’attribution (SCA)
Les sociétés d’attribution sont des sociétés qui ont pour objet l’acquisition ou la construction d’immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance et, accessoirement, la gestion et l’entretien de ces immeubles (CCH art. L 212-1). Une société d’attribution ayant pour objet la construction d’immeubles peut valablement recourir au bail à construction (Cass. 3e civ. 31-3-2005 n° 408 : RJDA 3/06 n° 219).
L’objet prévu par la loi n’étant pas exclusif, ces sociétés peuvent, en principe, exercer d’autres activités. Toutefois, celles d’entre elles qui entendent bénéficier du régime de la transparence fiscale ne pourront pas user de cette faculté, compte tenu des dispositions de l’article 1655 ter du CGI.
Les sociétés d’attribution peuvent être constituées sous toutes les formes prévues par la loi (CCH art. L 212-1). Mais, en pratique, elles revêtent le plus souvent la forme de société civile ou de société anonyme.
Ces sociétés sont régies par les dispositions des articles L 212-1 à L 212-13 et R 212-1 à R 212-16 du Code de la construction et de l’habitation (CCH).
Les dispositions relatives aux sociétés d’attribution sont d’ordre public (CCH art. L 212-13). Les statuts ne peuvent donc pas y déroger.
Par ailleurs, les règles générales qui résultent des articles 1832 et suivants du Code civil sont applicables aux sociétés d’attribution dans la mesure où elles ne sont pas contredites par le régime particulier défini par le Code de la construction et de l’habitation.
Sociétés civiles de construction-vente
Les sociétés civiles ayant pour objet la construction d’immeubles en vue de la vente – communément appelées « sociétés de construction-vente » – bénéficient d’un régime fiscal de faveur, ce qui explique, pour une large part, leur succès.
Ces sociétés sont caractérisées essentiellement par la spécificité de leur objet social et par la possibilité pour la société d’exiger des associés des apports de fonds supplémentaires pour lui permettre de réaliser cet objet.
Les sociétés de construction-vente sont dotées d’un statut particulier d’ordre public par les articles L 211-1 à L 211-4 et R 211-1 à R 211-6 du Code de la construction et de l’habitation (CCH).
Opérations d’achat-revente d’immeubles ou de lotissement
Sur le plan juridique, les sociétés civiles immobilières qui exercent une activité de marchand de biens ou procèdent à des opérations de lotissement accomplissent des actes de commerce.
S’il est admis que des opérations commerciales soient réalisées à titre accessoire par une société civile sans lui faire perdre sa nature civile, en revanche l’exercice à titre principal, voire exclusif, d’une activité commerciale entraîne l’apparition d’une société commerciale « créée de fait » dont les associés sont tenus indéfiniment et solidairement du passif et peuvent faire personnellement l’objet d’une procédure collective.
Sur le plan fiscal, les sociétés civiles se livrant à des opérations réputées commerciales en vertu de l’article 35 du CGI relèvent normalement de l’impôt sur les sociétés par application de l’article 206, 2 du même Code.
Tel est le cas des sociétés civiles exerçant une activité de marchand de biens ou d’intermédiaire pour l’achat et la vente d’immeubles, activités dont les profits sont expressément rangés par l’article 35, I du CGI dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.
Tel est le cas également des sociétés civiles qui procèdent à des opérations de lotissement, lorsque le terrain a été acheté par elles (ou, selon l’administration, leur a été apporté : BOI-BIC-CHAMP-20-30-20 n° 90) en vue de procéder à de telles opérations.
Sociétés de pluripropriété
Les sociétés de pluripropriété ont pour objet de mettre gratuitement à la disposition de leurs associés certains biens, meubles ou immeubles, dont l’acquisition et l’utilisation individuelles seraient trop onéreuses.
Il s’agit notamment :
- des sociétés d’attribution d’immeubles en jouissance à temps partagé (anciennes sociétés dites « de propriété spatio-temporelle ») dotées d’un statut juridique spécifique par la loi 86-18 du 6 janvier 1986 (n° 49600 s.) ;
- des sociétés concessionnaires de parkings ou de ports de plaisance ;
- des sociétés ayant pour objet d’accorder à leurs membres l’utilisation, en temps partagé, de biens meubles tels que bateaux de plaisance, chevaux, voitures, etc.
Les sociétés de pluripropriété revêtent, le plus souvent, la forme de sociétés de capitaux, mais il peut également s’agir de sociétés civiles. Lorsqu’elles revêtent la forme de société civile, elles sont soumises au régime de droit commun des sociétés civiles, ainsi que, pour certaines d’entre elles, aux dispositions de la loi du 6 janvier 1986.
Sociétés civiles de portefeuille
Les sociétés civiles de portefeuille ont pour objet principal, sinon exclusif, la détention et la gestion d’un portefeuille de valeurs mobilières, le plus souvent préexistant et apporté au moment de la constitution de la société par les fondateurs.
Cette composition de leur patrimoine leur confère une certaine originalité ; mais elles ne font l’objet d’aucune réglementation spécifique et elles sont soumises aux règles de droit commun posées par les articles 1845 et suivants du Code civil.
Elles doivent ainsi être distinguées des sociétés de gestion de portefeuille proprement dites, visées par l’article L 532-9 du Code monétaire et financier : ces dernières ne sont pas propriétaires d’un portefeuille ; elles sont des prestataires de services d’investissement (sociétés commerciales) agréés par l’AMF.
Sociétés à objet professionnel
Sociétés civiles professionnelles (SCP)
Les sociétés civiles professionnelles (SCP) ont pour but de permettre à des personnes physiques exerçant une profession libérale réglementée d’exercer en commun leur activité.
À compter du 1er septembre 2024, le régime des SCP sera fixé par l’ordonnance 2023-77 du 8 février 2023 qui abrogera la loi 66-879 en reprenant à droit constant la quasi-totalité de ses dispositions (Ord. 2023-77 art. 131 et 134).
Par « professions libérales », il faut entendre les activités qui ne sont ni commerciales, ni industrielles, ni artisanales, ni salariées. L’article 1, al. 1 de l’ordonnance 2023-77 du 8 février 2023, dont les dispositions entreront en vigueur le 1er septembre 2024, dispose que les professions libérales regroupent « les personnes exerçant à titre habituel, de manière indépendante et sous leur responsabilité, une activité ayant pour objet d’assurer, dans l’intérêt du client, du patient et du public, des prestations mises en œuvre au moyen de qualifications professionnelles appropriées ». Les activités exercées par les pharmaciens ou les courtiers d’assurance ne peuvent pas, en raison de leur nature commerciale, être exercées dans le cadre d’une SCP.
La SCP a une personnalité juridique propre qui exerce la profession en son nom, la clientèle appartient à la SCP et elle encaisse les honoraires facturés par les associés. Les bénéfices de la SCP sont reversés aux associés sous forme de dividendes. Les associés seront responsables indéfiniment et solidairement des dettes professionnelles sur l’ensemble de leurs biens personnels.
Sociétés civiles de moyens (SCM)
Les personnes physiques ou morales exerçant des professions libérales, et notamment les officiers publics et ministériels, peuvent constituer entre elles des sociétés civiles ayant pour objet exclusif de faciliter à chacun de leurs membres l’exercice de son activité.
À cet effet, les associés mettent en commun les moyens utiles à l’exercice de leur profession, sans que la société puisse elle-même exercer celle-ci (Loi 66-879 du 29-11-1966 art. 36 remplacé, à compter du 1-9-2024, par Ord. 2023-77 du 8-2-2023 art. 38 ; Ord. 2023-77 art. 134).
L’objet de la société civile de moyens (SCM) n’est pas l’exercice de la profession, mais seulement la prestation de services ou la fourniture de moyens matériels (personnel, locaux, appareils) à ses membres dont la situation juridique professionnelle ne subit par là même aucun changement. Elle a pour but de faciliter l’exercice de l’activité de chacun. Il n’y a ni partage de bénéfices ni clientèle commune, mais seulement contribution aux frais communs.
La société n’exerçant pas par elle-même la profession, elle ne jouit d’aucune ressource propre.
Sociétés pluriprofessionnelles
La possibilité pour des membres de professions différentes de constituer des sociétés ayant pour objet l’exercice en commun de leur profession au sein d’une même structure est actuellement prévue dans deux cas :
- pour les professionnels du droit et du chiffre (avocat, huissier ou commissaire de justice, notaire, expert-comptable, etc.), autorisés à constituer entre eux des sociétés dites « pluriprofessionnelles d’exercice » ;
- pour les professionnels médicaux, les auxiliaires médicaux et les pharmaciens, qui peuvent se grouper au sein d’une société interprofessionnelle de soins ambulatoires.
Sociétés civiles et groupements agricoles
e nombreux groupements constitués sous forme de sociétés civiles et ayant pour objet l’exercice d’une activité agricole obéissent aux règles générales prévues pour les sociétés civiles.
Cela dit, il a été prévu en leur faveur de nombreuses dispositions particulières qui dérogent aux règles de droit commun, notamment sur le plan fiscal.