Le bail à usage exclusivement professionnel est un contrat de location qui porte sur un local dans lequel le locataire exerce habituellement une profession non commerciale.
Champ d’application du statut : quand parle-t-on de bail professionnel ?
Le mini-statut des baux professionnels s’applique à tout local professionnel, c’est-à-dire à tout local dans lequel le locataire exerce une profession ou une fonction qui ne sont ni commerciales, ni rurales, qu’il s’agisse d’activités libérales réglementées ou non.
Selon le dernier état de la jurisprudence, le caractère lucratif ou non de l’activité est indifférent (Civ. 3e, 20 oct. 2016, n° 15-20.285, D. 2016. Actu. 2214 ; Dalloz actualité, 8 nov. 2015, obs. Cayol; AJDI 2017. 209, obs. Blatter ; ibid. 286, obs. Monéger; RTD com. 2017. 37, obs. Kendérian).
Les personnes morales peuvent revendiquer l’application du statut (Civ. 3e, 10 déc. 2002, n° 99-21.858D. 2003. AJ 496 ; AJDI 2003. 352, obs. Blatter). Ce, même si elle a opté pour une forme commerciale (Civ. 3e, 7 nov. 2001, n° 99-20.976, D. 2001. AJ 3535, obs. Rouquet). Il en va de même pour une association (V. not. Civ. 3e, 10 déc. 2002, n° 99-21.858, D. 2003. AJ 496 ; AJDI 2003. 352, obs. Blatter).
Le caractère d’ordre public
Les locations portant sur des locaux à usage exclusivement professionnel relèvent de l’article 57 A de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 (dite « loi Méhaignerie »), texte d’ordre public (L. 23 déc. 1986, art. 46).
Par ailleurs, depuis la loi de modernisation de l’économie, dite LME, n° 2008-776 du 4 août 2008, l’article 57-A a été amendé de manière à permettre si elles le veulent aux parties d’opter pour le régime des baux commerciaux dans les conditions fixées au 7° du I de l’article L. 145-2 du code de commerce.
Tous les aspects de la relation contractuelle non traités par le texte (V. notamment l’obligation de délivrance et d’entretien du bailleur, la question du loyer et des charges, la résiliation du bail, la sous-location, la cession…) relèvent de la volonté des parties ou, à défaut, des articles 1709 et suivants du code civil.
Durée du bail professionnel
Un bail professionnel doit être établi par écrit pour une durée de six ans.
À défaut de manifestation de volonté des parties, le bail se renouvelle tacitement pour six ans.
L’entrée dans les lieux
Au moment de chaque prise de possession des locaux par un locataire et lors de leur restitution, un état des lieux est établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles et joint au contrat de location. Si l’état des lieux ne peut être établi dans ces conditions, il est établi par un huissier de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire.
Le terme du bail professionnel
Trois issues sont possibles au terme du bail (article 57-A de la loi du 23 décembre 1986) :
- le bail prend fin, l’une ou l’autre des parties ayant donné congé ;
- le bail est reconduit tacitement;
- le bail est renouvelé.
Le congé
Le congé par le locataire
Le locataire peut toutefois, à tout moment, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de six mois, sans avoir à attendre le terme du bail.
Le congé par le bailleur
Le bailleur ne peut donner congé que pour le terme du bail,en respectant un délai de préavis de six mois.
Contrairement au statut des baux commerciaux, le statut des baux professionnels ne confère pas de droit au renouvellement au preneur. En effet, l’article 57 A précise que chaque partie peut notifier à l’autre son intention de ne pas renouveler le contrat à l’expiration de celui-ci en respectant un délai de préavis de six mois.
Comment calculer le délai de préavis de six mois ?
Si le congé est donné par huissier, le point de départ du délai de 6 mois sera la date de signification de l’acte.
Ce type de délai, que l’on a coutume de qualifier de ” délai à rebours “, se calcule en remontant dans le temps ( Cass. 2e civ., 20 oct. 2005, n° 04-10.138 : JurisData n° 2005-030439 ; Bull. civ. II, n° 259 ; JCP G 2006, II, 10005 , note A. Leborgne). Il n’y a pas lieu d’appliquer en la matière la prorogation de délai édictée par l’ article 642, alinéa 2 du Code de procédure civile , pour le cas où la date d’expiration du délai serait un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé ( Cass. 2e civ., 14 févr. 1990, n° 88-19.521 : JurisData n° 1990-700324 ; RTD civ. 1990, p. 557 , obs. R. Perrot. – Cass. 2e civ., 4 févr. 1998 : JurisData n° 1998-000416 ; Bull. civ. II, n° 41 ).
Exemple Supposons un bail se terminant le 31 décembre. Selon l’ article 641, alinéa 2 du Code de procédure civile , ” lorsqu’un délai est exprimé en mois, ce délai expire le jour du dernier mois qui porte le même quantième que le jour de la notification qui fait courir le délai. À défaut d’un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois “. Si l’on applique cette règle en remontant 6 mois en arrière, l’expiration du délai, c’est-à-dire la date ultime à laquelle doit être reçue la notification du congé est le 30 juin. Une notification effectuée au-delà de cette date entraînera la reconduction automatique du bail .
Motivation du congé
Les congés n’ont pas besoin d’être motivés. Ce principe s’applique tant au congé délivré par le locataire qu’au congé délivré par le bailleur, dès lors que le locataire n’a aucun droit au renouvellement de son bail ( Cass. 3e civ., 2 mai 2007, n° 06-13.834 : Rev. loyers 2007, p. 235 . – CA Paris, 6e ch. C, 7 févr. 2006 : JurisData n° 2006-294827 ; Loyers et copr. 2006, comm. 103 , obs. B. Vial-Pedroletti). Peu importe que le bail comporte une clause contraire, qui est inefficace ( Cass. 3e civ., 21 févr. 2006, n° 05-12.317 . – CA Montpellier, 2e ch., 28 oct. 2003 : JurisData n° 2003-232588 ; Loyers et copr. 2003, obs. B. Vial-Pedroletti). Ceci n’empêche pas que le juge puisse, à partir de l’examen des ” circonstances établies “, considérer que les fautes commises par le bailleur font dégénérer en abus l’exercice du droit de rompre ( Cass. 1re civ., 21 févr. 2006, n° 02-21.240 : JurisData n° 2006-032278 ; Bull. civ. I, n° 82 ; Contrats, conc. consom. 2006, comm. 99 , note L. Leveneur).
Il a été jugé qu’un congé délivré par erreur au locataire sur le fondement de l’ article 15, II de la loi du 6 juillet 1989 , accompagné d’une offre de vente (ce congé comportait donc une motivation erronée) devait être validé dès lors que les conditions de forme et de délai prévues par l’article 57-A étaient en l’espèce respectées ( Cass. 3e civ., 3 déc. 2003, n° 02-13.688 : JurisData n° 2003-021221 ; Bull. civ. III, n° 216 ; Loyers et copr. 2004, comm. 29 , obs. B. Vial-Pedroletti ; AJDI 2004, p. 455 , note Y. Rouquet ; RJDA 2003, n° 285).
Suites du congé
À la date d’effet du congé, donc à l’expiration du bail , le locataire devient occupant sans droit ni titre. Il doit quitter les lieux, faute de quoi son expulsion pourra être ordonnée.
Et le bailleur n’est nullement obligé de relouer au même locataire, s’il se porte candidat à la relocation ( Cass. 3e civ., 2 mai 2007, n° 06-13.834 : Rev. loyers 2007, p. 235 ).
Formalités en fin de bail
État des lieux
L’ article 57 B de la loi du 23 décembre 1986 , qui est d’ordre public ( L. n° 86-1290, 23 déc. 1986, art. 46 ) prévoit que lors de la restitution des locaux loués, un état des lieux est établi contradictoirement et amiablement par les parties ou par un tiers mandaté par elles. Cet état des lieux obéit aux mêmes règles que l’état des lieux ” d’entrée “.
En dehors de cette formalité obligatoire, les formalités ou incidents auxquels peut donner lieu la fin du bail ne font pas l’objet d’une réglementation particulière. Ce sont donc les règles de droit commun qui s’appliquent.
Modèles
Modèle de bail à usage professionnel
Modèle de congé par le bailleur
Ce congé peut être délivré par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, moyennant un délai de préavis de 6 mois. Compte tenu du risque de reconduction du bail en cas de congé nul, erroné ou tardif, l’utilisation de l’acte d’huissier de justice ou commissaire de justice est vivement conseillée.
Le [ …… ]
M. [ ……identification du locataire ]
Le bail dont vous bénéficiez aux termes d’un acte sous signature privée [ou : reçu par Me [ …… ], notaire à [ …… ]] en date du [ …… ] concernant l’immeuble sis à [ …… ] vient à expiration le [ …… ]
Je n’entends pas qu’il se poursuive au-delà de cette date et en conséquence, je vous donne congé pour cette échéance.
Vous voudrez bien, le moment venu, m’indiquer le jour et heure où nous pourrons procéder à un constat de l’état des lieux contradictoire.
Par ailleurs je vous rappelle qu’aux termes de ce contrat de bail il vous appartient :
- de justifier [ …… ] ;
- [ ……reprendre les diverses obligations imposées par le bail au locataire lors de sa sortie des lieux ] .
Veuillez agréer, [ …… ]
Modèle de congé par le locataire
Ce congé peut être délivré par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, moyennant un délai de préavis de 6 mois. D’une manière générale l’utilisation de l’acte d’huissier de justice ou commissaire de justice est préférable.
Le [ …… ]
M. [ ……identification du bailleur ]
L’objet de la présente lettre est de vous donner congé de l’immeuble [ou : les locaux] que vous m’avez donné en location suivant bail sous signature privée [ou : reçu par Me [ …… ], notaire à [ …… ]] en date du [ …… ] Je quitterai donc les lieux à la date du [ ……respecter un délai de 6 mois ] .
Je me tiens à votre disposition pour établir un état des lieux de sortie contradictoire et pour vous fournir les diverses justifications prévues par le contrat de bail.
Veuillez agréer, [ …… ]