La signification de l’acte, c’est-à-dire sa délivrance au destinataire est, après son contenu, le second élément composant l’acte du commissaire de justice.
Les modalités de signification
Compétence territoriale
Les commissaires de justice exercent leur compétence dans le ressort de la cour d’appel du siège de l’office et, le cas échéant, du ou des bureaux annexes attachés à l’office.
Jours et heures de la signification
L’article 664 du code de procédure civile impose au commissaire de justice le respect des jours ouvrables et des heures légales, et cela à peine de nullité, prévue à l’article 693 du même code.
Les significations ne pourront donc avoir lieu :
- les dimanches et les jours fériés.
- à une heure non comprise entre 6 heures et 21 heures.
Cependant, dans certains cas, avec l’autorisation du juge, la signification de l’acte en dehors du domicile pourra avoir lieu les jours fériés et même en dehors des heures légales (C. pr. civ., art. 664).
Les constats dressés à la demande d’un particulier peuvent être effectués à tout moment
Lieu de la signification (domicile)
La signification des actes, si elle est faite à personne, est valable quel que soit le lieu où elle est faite.
En revanche, si la remise de l’acte n’est pas à personne, la signification ne peut se faire qu’au domicile du destinataire (C. pr. civ., art. 589)
Si l’ouverture de la porte est refusée, le commissaire de justice ne peut passer outre pour signifier l’acte, sauf pour les significations d’actes d’exécution (C. pr. exéc., art. L. 142-1 et L. 142-3)
Pour les personnes morales, l’article 690 du code de procédure civile précise que la signification destinée à une personne morale ou à un établissement public à caractère industriel et commercial doit être faite au lieu de son principal établissement. La signification s’opérera donc au siège social ou à une succursale habilitée à recevoir l’acte.
Résidence
La signification à résidence, qui ne peut intervenir que si le domicile est inconnu, pose la difficulté de la définition de cette notion.
En effet, la résidence suppose une occupation physique d’une certaine durée, ce qui pose toujours des difficultés d’appréciation.
Il arrive parfois que l’adresse fournie ne soit qu’une boîte postale. Cette dernière n’est pas une résidence, et encore moins un domicile. Aucune signification ne peut donc être régularisée à une boîte postale.
Remise de l’acte
Règles concernant la remise de l’acte
L’acte doit être remis à la personne même du destinataire, mais si cela s’avère impossible, la loi prévoit d’autres modalités de remise d’acte. L’utilisation de ces modalités répond à une hiérarchie précise dont l’objectif est la prééminence de la signification « à personne » qui permet le mieux d’informer le destinataire de l’acte de ses droits et obligations (♦ C. pr. civ., art. 654).
Lorsque la décision concerne plusieurs personnes, la signification doit être faite séparément à chacune d’elle (♦ Cass. 2e civ., 15 janv. 2009, n° 07-20.472, n° 73 F – P + B), mais la signification du jugement peut s’effectuer par un seul acte à condition que cet acte indique des mentions de remise distinctes pour chacun des destinataires (♦ Cass. 2e civ., 31 mars 2011, n° 09-17.376, n° 661 F – P + B).
C’est ainsi, qu’en cas d’impossibilité pour le commissaire de justice de trouver le destinataire, il peut, en respectant une hiérarchie, adopter des modes secondaires de délivrance.
Quels sont les 4 modes de signification d’un acte ?
La signification des actes en matière civile peut revêtir 4 modes distincts :
- signification à personne (art. 654), c’est-à-dire à la personne du destinataire visé par l’acte
- signification à personne présente (655 al. 3 et 4), c’est-à-dire à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire mais qui n’est pas le destinataire et à condition que la personne présente l’accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité
- signification à domicile (656), lorsque personne au domicile ne peut ou veut recevoir l’acte (dépôt étude)
- signification à personne sans domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus (659), avec procès-verbal de recherches infructueuses
Lorsque le destinataire n’a ni domicile, ni résidence ni lieu de travail connu, la signification est faite dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile.
Hiérarchie des modes de signification
La hiérarchie des modes de signification, prévue par l’article 655 du code de procédure civile, impose au commissaire de justice de passer au mode suivant, si la modalité précédente ne peut être réalisée.
Cette hiérarchie est applicable aux personnes physiques, ainsi qu’aux personnes morales (♦ Cass. 2e civ., 10 nov. 1998, n° 96-17.149).
Lorsque la remise de l’acte n’a pas été faite à la personne même du destinataire, des formalités accessoires à la signification doivent être réalisées par le commissaire de justice, afin de garantir la meilleure information possible au destinataire.
Le commissaire de justice doit indiquer dans son acte les diligences l’ayant amené à signifier l’acte à une autre personne que le destinataire.
Remarque : les formules pré-imprimées contenant des croix à cocher ont été pratiquement abandonnées pour promouvoir une signification de qualité, précise et claire ; cette méthode ayant été souvent sanctionnée par la Cour de cassation (♦ Cass. 2e civ., 29 oct. 1990, n° 89-18.122).
Les juridictions du fond ne peuvent tirer du seul fait qu’un procès-verbal de signification est suffisamment circonstancié, que le commissaire de justice a accompli toutes les diligences nécessaires pour rechercher le destinataire de l’acte, sans en donner le détail. Pour la Cour de cassation, le procès-verbal de signification établi par le commissaire de justice doit être suffisamment circonstancié et indiquer clairement toutes les diligences effectuées pour rechercher le destinataire de l’acte. Elle casse donc les décisions qui déduisent du seul procès-verbal de signification, que les diligences requises ont été effectivement entreprises, sans préciser la nature de ces dernières (♦ C. pr. civ., art. 659 ♦ Cass. 2e civ., 7 déc. 2000, n° 99-13.636 ♦ Cass. 2e civ., 23 nov. 2000, n° 99-13.844).
Cependant, la Cour de cassation a jugé que les mentions, dans un acte de signification, des diligences accomplies par le commissaire de justice, pour signifier cet acte, valent jusqu’à inscription de faux, même s’il s’agit de mentions pré-imprimées. Elle a précisé que l’huissier (devenu commissaire) de justice n’était pas tenu d’indiquer, dans son procès-verbal de signification, l’identité des personnes auprès desquelles il s’était assuré du domicile du destinataire de l’acte (♦ Cass. 2e civ., 26 sept. 2013, n° 12-23.167).
Non-respect de la hiérarchie des modes de signification
La jurisprudence sanctionne le non-respect de la hiérarchie des modes de signification. Ainsi :
- l’utilisation d’une formule stéréotypée pour les modalités de la signification est une cause de nullité (♦ Cass. 2e civ., 29 oct. 1990, n° 89-18.122) ;
- l’acte doit relater les circonstances qui rendent impossible la signification à la personne même du destinataire (♦ Cass. 2e civ., 29 oct. 1990, n° 89-15.802 ♦ Cass. 1re civ., 8 janv. 1991, n° 89-14.807) ;
- la signification en mairie ne relatant pas les diligences accomplies par l’huissier (devenu commissaire) de justice pour remettre l’acte à la personne même du destinataire a été considérée comme valable, dès lors que le signifié n’a pas allégué d’un préjudice devant la cour d’appel (♦ Cass. 2e civ., 9 janv. 1991, n° 88-13.691) ;
- l’huissier (devenu commissaire) de justice n’ayant pas épuisé toutes les possibilités de s’assurer de l’adresse des destinataires étant une irrégularité de forme, la cour d’appel était tenue de rechercher si cette irrégularité faisait grief (♦ Cass. 2e civ., 9 janv. 1991, n° 89-11.893).
En matière de signification, le reproche sur l’insuffisance des démarches de l’huissier (devenu commissaire) de justice doit être fait devant le juge du fond et non en cassation (♦ Cass. 2e civ., 9 janv. 1991, n° 89-17.266).
Les 4 modes de signification
Signification à personne
Régime
Le régime de la signification à personne diffère selon que le destinataire de l’acte est une personne physique ou une personne morale.
Personnes physiques
Il résulte de la combinaison des articles 654, 655 et 663 du code de procédure civile que la signification doit être faite à personne, et ce n’est que si elle s’avère impossible que l’acte peut être délivré soit à domicile soit, à défaut de domicile connu, à résidence.
S’il signifie à personne, le commissaire de justice n’a pas à justifier de ses diligences. Toutefois, cette affirmation peut être nuancée par la rédaction de l’article 655 du code de procédure civile dont la formulation est ambiguë. Cet article dispose que le commissaire de justice doit relater les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification. En cas d’échec, il est tenu de rapporter les diligences qu’il a effectuées pour tenter la signification à personne.
L’obligation de signifier à personne s’analyse en une obligation de moyens. Le commissaire de justice doit donc prouver qu’il a utilisé tous les moyens mis à sa disposition pour remettre l’acte à la personne même du destinataire.
Il doit mentionner dans l’acte ses diverses investigations, recherches et difficultés, mais également l’accomplissement des formalités accessoires éventuelles (♦ Cass. com., 13 mars 1985, n° 83-16.764 ♦ Cass. 1re civ., 12 janv. 1988, n° 86-16.473 ♦ Cass. 2e civ., 28 oct. 1999, n° 98-12.724 ♦ Cass. com., 21 nov. 2000, n° 97-18.187, n° 1973 FS – P ♦ Cass. 2e civ., 6 juill. 2000, n° 98-22.001 ♦ Cass. 2e civ., 27 avr. 2000, n° 98-20.454) et procéder, en les mentionnant, à des investigations complémentaires pour établir la réalité du domicile du destinataire et, notamment, avant de délivrer l’acte au domicile de la fille du destinataire, recueillir auprès de cette personne, présente sur les lieux, tous renseignements utiles pour pouvoir effectuer une signification à personne (♦ Cass. 2e civ., 28 oct. 1999, n° 98-12.125).
En revanche, l’huissier (devenu commissaire) de justice qui s’était rendu au domicile du destinataire de l’acte et ne l’avait pas trouvé, n’avait pas à effectuer d’autres diligences pour tenter de remettre l’acte à personne (♦ Cass. 2e civ., 18 déc. 2003, n° 01-16.445, n° 1761 F – P + B).
Cependant, s’il connaissait le lieu de travail du destinataire de l’acte et ne l’avait pas trouvé à son domicile, il devait tenter la signification à personne sur ce lieu de travail, s’il se trouvait dans son ressort de compétence (♦ Cass. 2e civ., 21 oct. 2004, n° 02-21.468).
Signification à personne ainsi déclarée
Le commissaire de justice ne peut se faire justifier de l’identité du destinataire en lui demandant ses papiers. Souvent, il ne connaîtra pas le destinataire, ceci justifie la mention « à personne ainsi déclarée » qui correspond à la signification au destinataire lui-même, sur la déclaration faite par ce dernier, qu’il est bien la personne concernée.
La mention « à personne », sans plus de précision, permet de penser que le commissaire de justice connaît l’identité du destinataire de l’acte.
Signification Personnes morales
La règle de signification « à personne » s’applique également aux personnes morales.
La signification à une personne morale est réputée « à personne », lorsque celle-ci se fait entre les mains (C. pr. civ., art. 654, al. 2):
- du représentant légal,
- d’un fondé de pouvoir,
- ou d’une personne habilitée à cet effet.
Il faut que l’huissier (devenu commissaire) de justice indique la qualité de la personne physique à laquelle la copie a été remise, à défaut, l’acte n’est pas considéré comme remis à personne (♦ Cass. 2e civ., 24 mars 2005, n° 04-12.704, n° 498 FS – P + B).
La remise de l’acte à une personne habilitée à le recevoir pour le compte de la personne morale, en quelque lieu qu’elle se trouve, constitue une signification à personne. Elle peut ainsi être valablement effectuée au domicile du gérant (♦ Cass. 3e civ., 21 janv. 2021, n° 19-25.062). Cependant, la signification à une personne morale, en l’absence d’établissement, n’est pas valablement faite, dès lors que la copie de l’acte a été remise à une personne se déclarant habilitée à la recevoir alors que représentant une entité juridique distincte de celle destinataire de l’acte (♦ Cass. 2e civ., 2 mars 2023, n° 21-19.904, n° 207 F- B).
L’acte concernant une société mise en liquidation judiciaire doit être signifié au liquidateur, seul représentant de celle-ci (♦ CA Paris, 8e ch., sect. B, 7 mars 2002, n° 2001/13636). Cependant, la remise de l’acte peut se faire entre les mains de l’ancien gérant qui reste habilité à recevoir les actes de procédure pour le compte de la société bien que privé de ses pouvoirs de représentation du fait de la liquidation judiciaire de la société (♦ Cass. com., 11 avr. 2012, n° 11-10.210).
La signification à un mandataire liquidateur, représentant une personne morale, doit être délivrée selon les modalités de signification à personne physique (♦ CA Versailles, 9 sept. 1999, n° 1395/96).
La signification se fait au syndic d’une copropriété qui est chargé de représenter le syndicat des copropriétaires dans tous les actes civils et en justice (♦ Cass. 3e civ., 6 févr. 2002, n° 00-17.630).
1er destinataire possible : le représentant légal et le fondé de pouvoir
Le représentant légal de la personne morale est aisé à déterminer. En ce qui concerne les sociétés, la loi et les statuts définissent les organes qui agissent pour le compte de la personne morale, gérant président de conseil d’administration ( Cass. 2e civ., 16 avr. 1986 : Gaz. Pal. 1986, 2, pan. jurispr. p. 162 ) ou du directoire.
Quant au fondé de pouvoir, il dispose d’une délégation du représentant légal et peut agir à sa place. L’acte de signification doit mentionner les diligences effectuées pour délivrer l’acte au représentant légal de la société ( Cass. 2e civ., 4 juill. 2007, n° 06-14.360 : JurisData n° 2007-039998 ).Détermination du représentant
Signification à personne habilitée ainsi déclarée : mais qui est-elle ?
La qualité de personne habilitée ne peut résulter que de l’affirmation de la personne rencontrée, sans que le commissaire de justice soit en mesure de la contrôler. C’est pourquoi, la mention « personne habilitée ainsi déclarée » ou “Qui a déclaré être Habilité à recevoir l’acte” est largement utilisée.
Dès lors que la personne à laquelle est remis l’acte ne dénie pas expressément son habilitation à le recevoir, le commissaire de justice n’a pas à rechercher si la personne qui l’accepte est effectivement habilitée par les instances dirigeantes de la personne morale.
La signification destinée à une personne morale ne peut être remise à une personne habilitée à la recevoir en dehors du siège social qu’en l’absence d’existence réelle de ce dernier (♦ Cass. 2e civ., 30 janv. 2020, n° 18-25.198).
Le commissaire de justice n’a pas à vérifier l’exactitude des propos d’une personne qui se déclare habilitée. La formule « habilitée à cet effet » figurant dans le texte pré-imprimé de l’acte de signification n’entache pas sa régularité, dès lors qu’elle correspond aux déclarations de l’intéressée (♦ CA Paris, 26 févr. 1999, n° 1998/23394).
A l’égard d’une personne morale, la personne qui reçoit l’acte doit être habilitée. Cela peut poser des difficultés. Le représentant légal ne pose aucune difficulté, mais tel n’est pas le cas d’autres personnes au sein de cette structure, comptant parfois plusieurs milliers de collaborateurs (♦ CA Paris, 23e ch., sect. B, 9 sept. 1999, n° 1999/08587). Le commissaire de justice n’a pas l’obligation de vérifier l’exactitude de l’habitation de la personne physique qui reçoit l’acte pour une personne morale.
Le commissaire de justice n’a pas à effectuer d’investigations pour savoir si la personne est réellement habilitée. Dès lors que la personne qu’il rencontre se déclare habilitée à recevoir l’acte, il est bien fondé à le lui délivrer (♦ Cass. 2e civ., 18 janv. 2001, n° 99-15.814).
L’huissier (devenu commissaire) de justice n’est pas tenu de vérifier l’exactitude de la déclaration d’habitation faite par le responsable de la société de domiciliation (♦ Cass. 2e civ., 28 juin 2001, n° 99-21.691).
La jurisprudence révèle qu’il est beaucoup plus délicat de déterminer ce qu’il faut entendre par ” toute autre personne habilitée ” à laquelle le commissaire de justice peut remettre l’acte pour réaliser une signification à personne.
Ont été considérées comme personnes habilitées et donc la signification à personne retenue :
- un chef de courrier ( Cass. soc., 19 févr. 1970 : D. 1970, somm. p. 99),
- un gardien ( Cass. 2e civ., 6 oct. 1971 : D. 1972, p. 60 ; RTD civ. 1972, p. 440 , obs. P. Raynaud),
- une secrétaire ( Cass. soc., 9 févr. 1972 : Bull. civ. V, n° 117 . – Cass. com., 16 oct. 1990 : Gaz. Pal. 1991, somm. p. 348 , obs. Croze et Morel. – CA Dijon, 28 avr. 1992 : Rev. huissiers 1993, p. 661 , note Dahan. – V. Cass. soc., 12 sept. 2007, n° 06-13.667, FS-P+B . : JurisData n° 2007-040342 , la signification d’un jugement entre les mains d’une secrétaire qui n’a pas déclaré être habilitée à le recevoir est irrégulière. – Dans le même sens, V. Cour d’appel, Reims, ch. civ., 1re sect., 2 oct. 2018, n° 18/00858 ).), le responsable de la réception de l’hôtel exploité par une société anonyme, considéré comme ” manifestement habilité à recevoir les plis et les actes destinés à la direction ” ( CA Aix-en-Provence, 3 mars 1994 : JurisData n° 1994-043997 ).
En revanche, ont été exclues de cette qualification :
- la mère du gérant d’une SARL ( Cass. com., 4 nov. 1963 : D. 1964, p. 144),
- le secrétaire décédé d’un syndicat de copropriété ( CA Paris, 8 févr. 1985 : Bull. avoués 1985, p. 48) ;
- le sous-agent d’une compagnie d’assurances ( CA Dijon, 4 déc. 1992 : Gaz. Pal. 1994, 1, somm. p. 85 ),
- l’employée du notaire ayant rédigé un acte au profit d’une banque destinataire de la signification ( CA Chambéry, 4 oct. 1994 : Rev. huissiers 1996, p. 81 , note J. Prévault) ;
- le fils du gérant ( TGI Quimper, 2 nov. 1994 : JurisData n° 1994-048287 ).
Pour que la signification soit faite ” à personne “, il importe que l’acte ne soit pas remis à une personne quelconque trouvée au siège de la société.
Encore faut-il que cette personne soit au service de la société ( Cass. 2e civ., 17 nov. 1976 : Bull. civ. II n° 305 . – Cass. soc., 4 avr. 1979 : Bull. civ. V, n° 278 . – CA Basse-Terre, 1er juill. 1983 : Gaz. Pal. 1983, 2, somm. p. 401 ). Mais ce critère reste vague et l’ambiguïté de la notion de personne ” habilitée ” peut conduire à admettre que toute personne employée par la société peut recevoir l’acte ( Cass. 2e civ., 6 déc. 1971 : D. 1972, p. 60, pour un acte remis à un standardiste).
Or, le législateur n’entendait viser par ces termes que les personnes qui, au sein de la personne morale, avaient reçu pouvoir pour se faire remettre les plis destinés à la société (V. R. Perrot, obs. : RTD civ. 1988, spéc. p. 178).
Cette signification à personne pour une personne morale est très souvent une vaste supercherie : le commissaire de justice se permet bien souvent de remettre l’acte à toute personne se trouvant au siège qui se dirait habilitée alors même qu’elle n’aurait aucun lien avec la société destinataire ou qu’elle n’a en réalité par le pouvoir de prendre l’acte comme une “simple” secrétaire . Un livreur n’appartenant pas à la société destinataire de l’acte et se trouvant au siège social pour simplement déposer des affaires pourrait donc tout à fait se déclarer habilité à recevoir l’acte avec de grandes difficultés pour contester, le PV de l’huissier faisant foi sur ce point.
Il faut continuer inlassablement à plaider le texte et son esprit : la signification à personne est le niveau le plus élevé de signification qui fait par exemple courir le délai de 30 jours pour la contestation des injonctions de payer rendant irrecevable toute contestation ultérieure ! C’est parce que la sanction est si violente que le législtateur à imposé la signification à personne. L’idée est que seul dès lors que celui qui a le pouvoir d’agir en justice en contestation a effectivement reçu l’acte que le délai peut courir. Imaginez quelquu’un qui fait signifier une injonction de payer un 20 juillet et que son destinataire ne revient que le 2 septembre : il ne pourrait alors jamais contester !
De même, je n’exige pas de l’huissier qu’il vérifie la qualité de la personne qui s’estime habilitée, je demande simplement que lorsque le juge se prononcera sur ce point il vérifie lui la qualité du récipiendaire et en tire la conséquence sur la qualification de la signification. Entendez-moi bien : la remise d’un acte à un standardiste n’est pas nulle, elle vaut signification, simplement il faut qualifier de manière précise et conforme au droit ce niveau de signification : assurément, il ne peut s’agir d’une signification à personne si le standardiste n’a pas reçu une délégation de pouvoir écrite le lui permettant. Dès lors, au mieux il s’agit d’une remise à personne présente (mode n°2 prévu par 655 al 3 et 4 CPC) au pire de signification à domicile (mode n°3 prévu par 656 CPC).
Bien souvent les formulaires types prévus par les huissiers ne prévoient même pas le mode n°2 de signification à personne présente, forçant ainsi ce mode n°2 à être mélangé au mode n°1 de signification à personne. C’est contraire au texte et il convient de rappeler avec force que c’est à l’huissier de s’adapter au droit, et non l’inverse, souvent motivé par des raisons financières et pratiques. Tout comme pour la technologie, c’est à cette dernière de s’adapter et non à l’avocat de se plier aux contraintes techniques (par exemple le RPVA).
Lieu de la signification à personne morale
La signification à personne morale de droit privé ou à un établissement public à caractère industriel ou commercial doit s’effectuer, en principe, au lieu de son établissement. A défaut d’un tel lieu, elle l’est en la personne de l’un de ses membres habilité à la recevoir (♦ C. pr. civ., art. 690).
le commissaire de justice qui doit signifier un acte à une société n’a pas d’autre obligation que de tenter la signification au lieu du siège social fixé par les statuts et publié au Registre du commerce et des sociétés (RCS). Il ne peut pas lui être reproché de n’avoir pas poursuivi ses diligences au domicile du représentant de la société (♦ Cass. 2e civ., 8 mars 2001, n° 99-13.674 ♦ Cass. 3e civ., 3 févr. 2010, n° 09-11.389, n° 145 FS – P + B ♦ Cass. 2e civ., 11 mars 2010, n° 09-65.498, n° 572 F – P + B ♦ Cass. 2e civ., 19 févr. 2015, n° 13-28.140, n° 284 F – P + B ♦ Cass. 3e civ., 29 sept. 2015, n° 14-17.107).
La Cour de cassation censure la cour d’appel qui valide la signification effectuée en dehors du siège social à une personne habilitée à recevoir les actes, dès lors qu’elle n’a pas constaté que le destinataire de l’acte ne dispose pas d’un établissement où l’acte doit lui être notifié en application de l’article 690, alinéa 1er du code de procédure civile (♦ Cass. 2e civ., 15 avr. 2021, n° 20-10.844, n° 359 F – P).
Cependant, lorsque la personne morale n’a plus d’activité ni de lieu d’établissement, l’huissier (devenu commissaire) de justice doit tenter, lorsqu’il en connaît l’adresse, la signification au domicile du représentant légal, avant de dresser un procès-verbal de recherches infructueuses selon la procédure de l’article 659 du code de procédure civile (♦ Cass. 2e civ., 14 oct. 2004, n° 02-18.540, n° 1585 FS – P + B). Mais une boîte aux lettres, en l’absence de bureau et d’activité, ne suffit pas à caractériser l’existence effective du siège social (♦ Cass. 2e civ., 28 févr. 2006, n° 04-14.696, n° 276 FP – P + B). De même, la seule mention dans l’acte de signification que le nom de la société destinataire se trouve sur une boîte aux lettres ne suffit pas à établir la réalité du siège social et entraîne la nullité de l’acte (♦ Cass. 2e civ., 13 nov. 2015, n° 14-22.732, n° 1543 F – P + B).
La signification à personne morale ne suppose pas la recherche auprès d’un établissement secondaire désigné dans l’extrait Kbis par un simple numéro, sans localisation précise (Cass. 2e civ., 20 déc. 2001, n° 98-12.126).
Cependant, la jurisprudence a reconnu valable, à maintes reprises, la signification au domicile personnel, et entre ses mains, du représentant légal (♦ Cass. 1re civ., 16 juin 1987, n° 85-12.515 ♦ Cass. 2e civ., 19 mai 1999, n° 97-14.528 ♦ Cass. 2e civ., 30 avr. 2009, n° 07-15.582, n° 686 FS – P + B).
La signification à personne morale faite au local commercial portant l’enseigne de la société et lieu où le litige avait pris naissance, est valable même s’il ne s’agit pas du siège social de ladite société (♦ Cass. 2e civ., 18 sept. 2003, n° 01-16.283).
La signification faite au lieu du principal établissement, même s’il ne s’agit pas du siège social de la société destinataire de l’acte et réalisée de jour alors que cet établissement est une discothèque fermée la journée, est régulière (♦ Cass. 1re civ., 12 oct. 2016, n° 15-14.896, n° 1105 F – P + B).
Signification à personne présente (655 al. 3 et 4)
Circonstances de la signification à personne présente au domicile ou à résidence
Dès lors que la signification à la personne même du destinataire s’avère impossible, même sur son lieu de travail, le commissaire de justice doit tenter de signifier au domicile ou, à défaut de domicile connu, à la résidence du destinataire de l’acte (♦ C. pr. civ., art. 655).
Dès lors qu’il a eu confirmation du domicile du destinataire et que celui-ci est momentanément absent, l’huissier (devenu commissaire) de justice a pu signifier l’acte à domicile sans être tenu de s’y présenter à nouveau ou de tenter une signification sur le lieu de travail (♦ Cass. 2e civ., 2 déc. 2021, n° 19-24.170, n° 1123 F – B).
Signification à une personne présente au domicile
Il s’agit d’une personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire initial de l’acte.
La notion de domicile résulte de l’article 102 du code civil selon lequel le domicile de tout Français, quant à l’exercice de ses droits civils, est au lieu où il a son principal établissement.
La signification à domicile s’applique aussi bien aux personnes physiques qu’aux personnes morales.
Ce mode de signification peut se faire à toutes personnes présentes au domicile, sans qu’il existe de hiérarchie entre ces personnes. Le discernement de la personne rencontrée est indispensable pour parvenir à une signification valable. La signification à un mineur est possible, même jeune, à condition que le commissaire de justice s’assure que ce dernier soit capable de transmettre l’acte à son destinataire.
- Exemple 1 : un enfant de 12 ans fait preuve d’un discernement suffisant (♦ Cass. 2e civ., 21 juin 1995, n° 93-10.326).
- Exemple 2 : signification à une adolescente de 15 ans (♦ CA Versailles, 1re ch., sect. B, 22 oct. 1999, n° 8017/97).
Lors de la signification d’un acte à domicile, le commissaire de justice n’a pas à préciser le nom de la personne qui confirme l’exactitude de l’adresse du destinataire. Une telle précision n’apporterait, en fait, aucun élément déterminant, le commissaire de justice ayant la responsabilité de la signification. Au contraire, cela serait de nature à générer des conflits de voisinage entre le destinataire et celui qui aurait fourni l’information (♦ Cass. 2e civ., 14 juin 2001, n° 99-21.577).
Mais cette signification à la personne présente au domicile du destinataire ne pourra se faire que pour autant que cette personne accepte la copie et déclare ses nom, prénoms et qualité (♦ C. pr. civ., art. 655, al. 4).
A cet égard, l’existence d’une boîte aux lettres n’est pas un élément déterminant pour caractériser le lieu du principal établissement du destinataire d’un acte (♦ Cass. 2e civ., 25 mai 2000, n° 98-22.874).
Signification à domicile – dépôt étude (656)
Le meilleur moyen de le faire annuler : contester que l’adresse correspond à son domicile : la seule indication du nom du destinataire d’un acte sur la boîte aux lettres n’est pas de nature à établir, en l’absence d’autres diligences, la réalité du domicile du destinataire de l’acte ( Cass. 2e civ., 4 mars 2021, n° 19-25.291).
Suppression des anciens modes de signification
Le décret du 28 décembre 2005 réformant la procédure civile et certaines procédures d’exécution a modifié les modalités de signification des actes d’huissier (devenu commissaire) de justice. La remise de l’acte en mairie a été remplacée par le dépôt de l’acte à l’étude du commissaire de justice. Les modes de signification à gardien et à voisin ont également été supprimés. Ces dispositions sont applicables depuis le 1er mars 2006 (♦ C. pr. civ., art. 655 à 658).
Le dépôt de l’acte à l’étude du commissaire de justice significateur remplace, depuis le 1er mars 2006, le dépôt en mairie (♦ C. pr. civ., art. 656).
Dépôt de l’acte à l’étude du commissaire de justice
Personne ne veut ou ne peut recevoir l’acte à domicile.
Lorsque le commissaire de justice se rend au domicile du destinataire de l’acte et que les personnes présentes ne peuvent ou ne veulent recevoir l’acte, celui-ci est déposé en son étude avec les formalités obligatoires qui s’y rapportent.
L’article 656 du code de procédure civile indique que si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l’acte et s’il résulte des vérifications faites par le commissaire de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, le commissaire de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l’article 655 du même code.
Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l’acte et s’il résulte des vérifications faites par le commissaire de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, le commissaire de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l’article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l’acte doit être retirée dans le plus bref délai à l’étude du commissaire de justice, contre récépissé ou émargement par l’intéressé ou par toute personne spécialement mandatée (♦ C. pr. civ., art. 656, al. 1er).
La copie de l’acte est conservée à l’étude pendant 3 mois. Passé ce délai, le commissaire de justice en est déchargé (♦ C. pr. civ., art. 656, al. 2).
Le commissaire de justice peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l’acte à une autre étude où celui-ci pourra la retirer dans les mêmes conditions (♦ C. pr. civ., art. 656, al. 3).
Lorsque l’acte n’est pas délivré à personne, le commissaire de justice mentionne sur la copie les conditions dans lesquelles la remise a été effectuée (♦ C. pr. civ., art. 657, al. 1er).
La copie de l’acte signifié doit être placée sous enveloppe fermée, ne portant que l’indication des nom et adresse du destinataire de l’acte et le cachet du commissaire de justice apposé sur la fermeture du pli (♦ C. pr. civ., art. 657, al. 2).
Dans tous les cas prévus aux articles 655 et 656, le commissaire de justice doit aviser l’intéressé de la signification, le jour même ou au plus tard le premier jour ouvrable, par lettre simple comportant les mêmes mentions que l’avis de passage et rappelant, si la copie de l’acte a été déposée en son étude, les dispositions du dernier alinéa de l’article 656. La lettre contient, en outre, une copie de l’acte de signification. Le cachet du commissaire de justice est apposé sur l’enveloppe (♦ C. pr. civ., art. 658).
Le manquement du destinataire de l’acte à son obligation d’informer le requérant de son changement d’adresse n’exonère pas l’huissier (devenu commissaire) de justice de son obligation d’effectuer des recherches suffisantes pour signifier cet acte (♦ Cass. 2e civ., 4 mars 2021, n° 19-25.291, n° 165 F – P).
Date de l’acte signifié à l’étude du commissaire de justice
Il s’agit évidemment de la date de l’acte lui-même et non de la date de l’éventuel retrait de l’acte à l’étude.
Le premier alinéa de l’article 656 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005, prévoyait expressément que le dépôt de la copie en mairie réputait la signification faite à domicile ou à résidence. Ceci renvoyait aux dispositions de l’article 653 du même code qui prévoit que la date de l’acte est celle du jour où la signification est faite à personne, à domicile ou à résidence.
Cette disposition n’a pas été reprise, mais on peut penser que la règle reste la même et que la date de l’acte est celle de la visite à domicile du commissaire de justice ou de son clerc assermenté.
Exemples
Pour déposer l’acte valablement à l’étude, la simple mention du nom du destinataire sur une boîte aux lettres n’est pas de nature à établir la réalité de son domicile lorsque la décision à signifier mentionne une adresse différente (♦ Cass. 1re civ., 22 janv. 2020, n° 18-21.210 ♦ Cass. 2e civ., 4 mars 2021, n° 19-25.291, n° 165 F – P).
La seule mention dans l’acte indiquant que le nom du destinataire figure sur la boîte aux lettres n’est pas de nature à établir, en l’absence de mention d’autres diligences, la réalité de son domicile (♦ Cass. 2e civ., 8 sept. 2022, n° 21-12.352, n° 840 F – B ♦ Cass. com., 20 sept. 2023, n° 21-14.252, n° 577 F – B). Il en est de même pour la seule mention du nom du destinataire sur l’interphone (♦ Cass. 2e civ., 21 déc. 2023, n° 22-18.480, n° 1292 F – B).
La seule vérification auprès des « autorités locales », sans aucune autre précision, est insuffisante à caractériser les diligences requises pour s’assurer de la réalité de ce domicile, lesquelles ne résultent pas davantage d’un second passage de l’huissier (devenu commissaire) de justice au domicile prétendu du destinataire de l’acte au cours duquel il n’a été trouvé aucune personne susceptible de recevoir la copie de l’acte (♦ Cass. 2e civ., 2 févr. 2023, n° 21-18.785).
Signification à personne sans domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus (659)
Signification à une personne physique
Parfois, le destinataire d’un acte n’a pas laissé d’adresse ou n’a pas de lieu de travail connu. Cette situation ne doit pas empêcher la procédure d’être menée à son terme. C’est pourquoi, une signification particulière a été mise en place.
Cette procédure consiste, pour le commissaire de justice, à s’assurer que le destinataire n’a plus d’adresse connue, d’en dresser un procès-verbal et de notifier l’acte à la dernière adresse connue. Dès lors, la signification effectuée à l’adresse indiquée dans l’arrêt de la cour d’appel faisant l’objet d’un pourvoi, alors que le défendeur avait mentionné une adresse différente dans ses dernières conclusions, est irrégulière (♦ Cass. 2e civ. avis, 10 juill. 2014, n° 13-14.271).
La signification d’un acte par procès-verbal de recherches infructueuses à une autre adresse que la dernière adresse connue n’est pas valable (♦ Cass. 2e civ., 2 juill. 2020, n° 19-14.893, n° 658 F – P + B + I)(♦ Cass. 2e civ., 8 févr. 2024, n° 22-11.190).
La signification peut être effectuée par procès-verbal de recherches infructueuses, même si le lieu de travail du destinataire de l’acte est connu. En l’espèce, le destinataire n’ayant ni domicile ni résidence connus et étant demeuré introuvable malgré plusieurs visites sur son lieu de travail, il y avait bien lieu de signifier l’acte selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile (♦ Cass. 2e civ., 19 nov. 2008, n° 07-19.472, n° 1543 FS – P + B).
Dès lors que la signification de l’acte a été effectuée selon les modalités prévues par l’article 659 du code de procédure civile, il en résulte qu’elle n’a pas été délivrée à personne, même si l’avis de réception de la lettre recommandée a été signé par le destinataire de l’acte (♦ Cass. 3e civ., 6 mai 2014, n° 13-14.346).
Cette signification respecte le contradictoire et est conforme aux grands principes de la procédure civile.
La signification d’un jugement, par voie de procès-verbal de recherches infructueuses, satisfaisait aux exigences du procès équitable et ne violait donc pas les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme en son article 6, § 1 (♦ Cass. 2e civ., 19 déc. 2002, n° 01-02.583, n° 1238 F – P + B).
Le commissaire de justice doit faire ses recherches sous le nom indiqué dans la décision qu’il est chargé de signifier. Mais si le créancier connaît le nouveau nom de la personne, par exemple, la femme mariée ayant changé de nom, il ne saurait occulter cette information (♦ Cass. 2e civ., 30 sept. 1999, n° 96-17.048), ou s’il a simplement la possibilité de l’obtenir (♦ Cass. 2e civ., 6 juill. 2000, n° 98-22.001).
L’huissier (devenu commissaire) de justice doit disposer d’éléments d’identification suffisants lui permettant de se renseigner auprès de tiers qui seraient informés de la nouvelle adresse du destinataire de l’acte (♦ Cass. 2e civ., 20 déc. 2001, n° 97-21.423).
Signification à une personne morale
Notion de personne morale
L’article 659 du code de procédure civile est également applicable à la signification à des personnes morales n’ayant plus d’établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le RCS (♦ C. pr. civ., art. 659, al. 4) ou, à une personne morale n’ayant plus de siège social ou d’établissement actif. La lettre recommandée, prévue à l’occasion de cette signification, ne peut être adressée valablement au domicile du représentant légal de la personne morale. L’envoi par un huissier (devenu commissaire) de justice de la lettre recommandée prévue à l’article 659, alinéa 2, à l’adresse du président de l’association destinataire de l’acte et non au dernier domicile connu de celle-ci, ne peut suppléer à celui requis, à peine de nullité par le texte précité (♦ CA Versailles, 26 mars 1998, n° 1475/97).
Cette signification est possible tant pour les personnes physiques que pour les personnes morales (♦ Cass. 2e civ., 20 déc. 2001, n° 98-12.126).
Il a pu être reproché à l’huissier (devenu commissaire) de justice de ne pas avoir interrogé le mandataire de la personne morale, surtout si ce dernier était seul susceptible de lui donner des renseignements de nature à déterminer l’adresse actuelle (♦ Cass. 2e civ., 28 sept. 2000, n° 99-10.843).
La Cour de cassation a considéré que le mandant agissait de manière malicieuse en laissant volontairement l’huissier (devenu commissaire) de justice dans l’ignorance de la nouvelle adresse, et en fournissant à ce dernier, un lieu où le destinataire était propriétaire, mais ne résidait pas. Le procès-verbal de recherches infructueuses établi était donc nul, même si les diligences exigées par la loi avaient été accomplies (♦ Cass. 2e civ., 21 déc. 2000, n° 99-13.218, n° 1424 P + B).
Lorsque la personne morale n’a plus d’établissement connu au lieu de son siège social, l’huissier (devenu commissaire) de justice doit rechercher s’il n’existe pas une nouvelle adresse où pourrait être signifié l’acte. Il ne doit pas se contenter de vérifier que plus personne ne se trouve au siège social légal de la personne morale (♦ Cass. 2e civ., 20 oct. 2005, n° 03-19.489, n° 1594 FS – P + B). Une boîte aux lettres, seule, en l’absence de bureau et d’activité, ne suffit pas à caractériser l’existence effective du siège social (♦ Cass. 2e civ., 28 févr. 2006, n° 04-14.696, n° 276 FP – P + B).
Procès-verbal de recherches infructueuses
Lorsque la personne à qui l’acte doit être signifié n’a ni domicile, ni lieu de travail connus, le commissaire de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte (♦ C. pr. civ., art. 659, al. 1er).
Il doit relater les diligences précises et concrètes effectuées pour trouver la véritable adresse (♦ Cass. 2e civ., 23 sept. 2004, n° 02-20.742 ♦ Cass. 2e civ., 21 mars 2013, n° 12-14.142).
La Cour de cassation a considèré que les recherches de l’huissier (devenu commissaire) de justice étaient suffisantes par le seul fait que le courrier adressé au dernier domicile connu du destinataire de l’acte soit revenu avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée », ce qui signifie que le destinataire de l’acte n’avait pas communiqué sa nouvelle adresse à la Poste (♦ Cass. 2e civ., 13 janv. 2000, n° 98-17.883). De même, le fait qu’une société soit en liquidation judiciaire a interdit toute démarche utile auprès de celle-ci pour retrouver le destinataire d’un acte (♦ Cass. 2e civ., 5 juill. 2000, n° 98-18.486).
La Cour de cassation rappelle que les juridictions du fond devaient rechercher si ces diligences avaient été accomplies. Toutefois, d’éventuelles insuffisances dans les recherches qui pourraient être relevées par les juridictions du fond, n’entraînent la nullité que pour autant qu’un grief peut être rapporté par le destinataire de l’acte (♦ Cass. 2e civ., 21 déc. 2000, n° 99-15.083 ♦ Cass. 2e civ., 21 déc. 2000, n° 99-12.488).
Le juge doit rechercher si le demandeur à l’acte connaissait en plus de l’adresse indiquée au Registre du commerce l’adresse personnelle du destinataire de l’acte. Il doit à la demande d’une partie rechercher si le demandeur à l’acte n’a pas caché volontairement des informations à l’huissier (devenu commissaire) de justice chargé de signifier l’acte (♦ Cass. 2e civ., 21 déc. 2023, n° 21-25.887, n° 1263 F – B).
Il n’a pu être reproché à l’huissier (devenu commissaire) de justice de n’avoir pas fait le rapprochement concernant l’adresse du destinataire de l’acte avec un autre acte, signifié plusieurs mois auparavant, à ce même destinataire dans un autre dossier (♦ Cass. 1re civ., 13 juill. 2004, n° 02-18.051).
Lors de la signification de l’acte, l’huissier (devenu commissaire) de justice n’est pas tenu de mentionner le nom des personnes rencontrées, ni la dénomination des services administratifs interrogés (♦ Cass. 2e civ., 10 juill. 2008, n° 07-14.746).
Lors de la signification d’actes tels qu’une assignation et un jugement, l’huissier (devenu commissaire) de justice n’est pas tenu de prendre connaissance de leur contenu intégral pour rechercher l’adresse du destinataire, et de surcroît, à supposer qu’il l’ait fait, d’engager de longues et coûteuses recherches telles que la consultation du service de la publicité foncière (♦ Cass. 2e civ., 30 janv. 2014, n° 13-13.868).
De vaines recherches auprès de la famille du requis ainsi que dans l’annuaire électronique ne permettent pas à l’huissier (devenu commissaire) de justice de signifier l’acte par procès-verbal de recherches infructueuses prévu par l’article 659 du code de procédure civile (♦ Cass. 2e civ., 10 juin 2021, n° 20-13.826).
Avant de dresser un procès-verbal de recherches infructueuses, l’huissier (devenu commissaire) de justice doit, si le destinataire n’a pas de domicile connu, tenter une signification à personne sur le lieu de travail (♦ Cass. 2e civ., 8 déc. 2022, n° 21-14.145, n° 1269 F – B).
Répond aux conditions de l’article 659 du code de procédure civile, le procès-verbal de recherches qui mentionne que, selon les renseignements obtenus sur place auprès de la nouvelle locataire, le destinataire de l’acte et son épouse sont partis sans laisser d’adresse depuis environ un an, que la recherche sur l’annuaire n’a rien donné, que les courriers simples et recommandés ont été retournés par les services postaux, que ceux-ci opposent le secret professionnel et que les recherches par l’annuaire électronique n’ont pas permis d’obtenir un quelconque renseignement (♦ Cass. 2e civ., 13 avr. 2023, n° 21-20.795). Il en est de même lorsque le procès-verbal de recherches mentionne que le destinataire de l’acte ne réside pas à la dernière adresse connue située chez une tierce personne, qu’un résident a déclaré qu’il avait déménagé dans une autre commune, que les messages laissés sur son répondeur sont restés sans réponse, que les services municipaux n’ont pas pu donner de renseignements utiles et que les recherches sur internet, notamment sur le site des pages blanches et le moteur de recherche « Google », n’ont pas permis de le retrouver (♦ Cass. 1re civ., 8 nov. 2023, n° 21-25.820).
Envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception et d’une lettre simple
Le même jour, ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant, le commissaire de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, une lettre recommandée avec demande d’avis de réception (LRAR) contenant une copie du procès-verbal de recherches, à laquelle est jointe une copie de l’acte, qui doit être signifié (♦ C. pr. civ., art. 659, al. 2).
Pour le cas où le destinataire ne retirerait pas cette LRAR, cet envoi est doublé par une lettre simple, toujours au dernier domicile connu du destinataire, qui avise ce dernier de l’accomplissement de cette formalité d’envoi (♦ C. pr. civ., art. 659, al. 3).
La signification reste valable, même si la lettre recommandée revient avec la mention « non réclamée » et la nouvelle adresse du destinataire (Cass. 2e civ., 18 nov. 2004, n° 03-13.158, n° 1827 F – P + B).
La signification est nulle si la lettre simple et la LRAR ont été adressées à une dernière adresse erronée (Cass. 2e civ., 16 déc. 2004, n° 03-11.510, n° 2022 FS – P + B).
La Cour de cassation a précisé que le juge pouvait, pour vérifier la régularité des mentions concernant les voies de recours, ouvrir la lettre recommandée accessoire à la signification, lorsque le destinataire est parti sans laisser d’adresse, cette démarche n’étant pas soumise au principe du contradictoire. Il est, cependant, curieux que les juges aient ouvert ce courrier alors que la validité de l’acte et, notamment, des voies de recours sont vérifiables en consultant le deuxième original de l’acte. De plus, même si une erreur s’était glissée dans le document envoyé, il aurait été difficile pour le destinataire de justifier d’un grief concernant l’absence d’une information qu’il n’aurait de toute manière jamais reçue (Cass. 2e civ., 19 mai 2005, n° 03-15.608, n° 812 F – P + B).
Règles communes à la signification à personne présente et à domicile
Dès lors que la signification d’un acte n’a pas été faite à la personne même du destinataire, le commissaire de justice ou son clerc significateur doit accomplir trois formalités, qualifiées d’accessoires, mais indispensables. En outre, il doit assurer la confidentialité de la remise, et ceci se fait par la remise de l’acte sous pli fermé.
Ce pli doit comporter d’un côté le nom et l’adresse du destinataire de l’acte et de l’autre côté le cachet du commissaire de justice apposé sur la fermeture du pli (♦ C. pr. civ., art. 657).
Si les formalités ont été accomplies, la signification est régulière, sans qu’il importe que l’avis de passage et la lettre soient effectivement parvenus au destinataire (Cass. 2e civ. 12-10-1972 n° 71-11.981 : Bull. civ. II n° 244 ; Cass. 2e civ. 12-11-1980 n° 79-13.231 : Bull. civ. II n° 230).
Avis de passage
A l’usage du destinataire de l’acte, ce document n’a aucune forme particulière, mais il doit contenir l’indication des modalités de la signification et notamment la personne qui a reçu la copie.
Cet avis de passage comporte la date de la signification et est laissé en un endroit où le destinataire de l’acte le trouvera facilement, dès son retour à son domicile (♦ C. pr. civ., art. 655, dern. al.).
En l’absence de dépôt de cet avis de passage, la signification à domicile est nulle au motif que le commissaire de justice n’a pas effectué toutes les formalités prévues par la loi à peine de nullité (Cass. 2e civ., 21 déc. 2023, n° 22-18.480, n° 1292 F – B).
Lettre simple
Le commissaire de justice doit aviser le destinataire de l’acte de la signification par lettre simple (♦ C. pr. civ., art. 658).
Cette lettre simple comporte une copie de l’acte de signification, identifie la personne qui a reçu la copie qui lui était destinée.
La lettre simple, envoyée par le commissaire de justice au destinataire d’une signification, ne doit comporter, outre le courrier d’information, que la copie de l’acte de signification et non celle des pièces annexées à cette copie. La Cour de cassation indique que les dispositions de l’article 658 du code de procédure civile exigent seulement que la lettre contienne une copie de l’acte de signification et que le fait qu’il y soit fait mention de l’ordonnance à signifier, alors qu’elle n’avait pas été jointe, n’est pas constitutif d’un faux (♦ Cass. 2e civ., 15 sept. 2005, n° 03-17.914, n° 1359 F – P + B).
Cette lettre doit être adressée le jour même de la signification, ou au plus tard le premier jour ouvrable (♦ Cass. 3e civ., 16 févr. 1994, n° 92-13.244) : la mention de l’envoi de la lettre et sa date, même si elle ne figure pas sur la copie, n’entraîne pas la nullité de l’acte (♦ Rép. min. n° 40 : JOAN Q, 12 juill. 1993, p. 2027).
La mention dans l’acte de l’envoi de la lettre simple, dans les délais, fait foi jusqu’à inscription de faux (♦ Cass. ch. mixte, 6 oct. 2006, n° 04-17.070, n° 245 P + B + R + I).
Le cachet du commissaire de justice est apposé sur l’enveloppe (♦ C. pr. civ., art. 658, dern. al.).
Cependant, l’absence du retour de la lettre simple ne permet pas de déduire que le destinataire a bien eu connaissance de l’acte. Cette lettre simple n’est qu’un des éléments permettant de penser que le destinataire a eu connaissance de l’acte, elle sert surtout à confirmer la réalité du domicile (♦ Cass. 2e civ., 10 nov. 2005, n° 03-20.369, n° 1739 FS – P + B).
Récépissé ou émargement
Dans l’hypothèse du dépôt de l’acte à l’étude, son destinataire, ou toute personne spécialement mandatée par lui doit, lors du retrait, donner récépissé ou émarger le registre des actes déposés à l’étude (♦ C. pr. civ., art. 656, al 1er).
Le récépissé n’a aucune forme ni aucun contenu déterminé. C’est un document signé du destinataire, par lequel ce dernier atteste avoir reçu un acte.
Ce récépissé est joint à l’original de l’acte et le tout est conservé par le commissaire de justice.
Sanction du défaut de signification
La violation des dispositions de l’article 654 du CPC, 655 CPC est sanctionnée par la nullité (CPC art. 693).
La signification d’un arrêt d’appel par procès-verbal de recherches infructueuses est nulle pour vice de forme dès lors qu’elle aurait pu être délivrée à la dernière adresse connue et que le destinataire, n’ayant pu exercer un recours, justifie d’un grief. Cass. 2e civ. 8-3-2024 n° 22-11.190 F-D
Le délai de recours ne court pas, idem pour les astreintes
Les mentions obligatoires prévues à peinne de nullité
Aux termes de l’article 648 CPC
“Tout acte d’huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs :
1. Sa date ;
2. a) Si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;
b) Si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.
3. Les nom, prénoms, demeure et signature de l’huissier de justice ;
4. Si l’acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social.
Ces mentions sont prescrites à peine de nullité.”
Aux termes de l’article 114 CPC s’agissant d’une nullité de forme
“Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.”
Le défaut de désignation de l’organe représentant légalement une personne morale dans un acte de procédure ne constitue qu’un vice de forme et la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour la partie qui l’invoque de prouver l’existence d’un grief. ● Soc. 31 mars 2009, no 08-60.517 P
Et la signification à une personne physique qui a donné son consentement pour la signification des actes de commissaire de justice par voie électronique ?