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L’insaisissabilité de la résidence principale de l’entrepreneur
D’abord admise par la loi sur déclaration notariée et publicité de celle-ci, l’insaisissabilité de la résidence principale d’une personne physique immatriculée au registre national des entreprises est désormais de plein droit (cf. Loi 2015-990 du 6-8-2015 art. 206 modifiant C. com. art. L 526-1, al. 1).
La Cour de cassation fait ici application à l’insaisissabilité de plein droit d’un principe qu’elle avait déjà affirmé pour la déclaration d’insaisissabilité (Cass. com. 17-11-2021 no 20-20.821 FS-PB : BRDA 1/22 inf. 15). La solution est transposable, par identité de texte, à la déclaration d’insaisissabilité portant sur un bien de l’entrepreneur autre que sa résidence principale (cf. art. L 526, al. 2).
Lorsque la déclaration d’insaisissabilité ou l’insaisissabilité de droit est opposable à la procédure collective, le bien concerné est hors procédure (cf. Cass. com. 13-3-2012 no 10-27.087 F-D : D. 2012 p. 2202 obs. P.-M. Le Corre) et il ne peut pas être vendu dans le cadre de celle-ci pour apurer le passif (par exemple, Cass. com. 24-3-2015 no 14-10.175 FS-PB : RJDA 6/15 no 451). Mais les créanciers auxquels la déclaration n’est pas opposable – ceux dont la créance est née avant la publication de la déclaration ou avant l’insaisissabilité de plein droit ou ceux dont la créance n’est pas née à l’occasion de l’activité professionnelle du débiteur – peuvent saisir ce bien (Cass. com. 4-4-2016 no 14-24.640 FS-PB : RJDA 7/16 no 565 ; Cass. com. 13-9-2017 no 16-10.206 F-D : RJDA 2/18 no 169). L’administration fiscale le peut aussi en cas de manœuvres frauduleuses de l’entrepreneur ou d’inobservation grave et répétée par celui-ci de ses obligations fiscales (art. L 526-1, al. 3)
Pour quelle durée ?
La résidence principale de l’entrepreneur reste insaisissable après qu’il a cessé son activité. La cessation d’activité d’un entrepreneur ne met pas fin aux effets de l’insaisissabilité de plein droit de son logement, qui perdurent jusqu’à ce que les droits des créanciers auxquels elle est opposable soient éteints. Cass. com. 11-9-2024 no 22-13.482 F-B. L’insaisissabilité de plein droit des droits de la personne immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel sur l’immeuble où est fixée sa résidence principale n’a d’effet qu’à l’égard des créanciers dont les droits naissent à l’occasion de l’activité de cette personne. Il en résulte que les effets de l’insaisissabilité subsistent aussi longtemps que les droits des créanciers auxquels elle est opposable ne sont pas éteints, de sorte que la cessation de l’activité professionnelle de la personne précédemment immatriculée ne met pas fin, par elle-même, à ses effets.
Quels moyens de contournement pour le liquidateur ?
Le liquidateur judiciaire n’est toutefois pas complètement démuni. Il peut :
- contester l’insaisissabilité si le bien qu’il entend faire vendre n’était plus la résidence principale de l’entrepreneur lors de l’ouverture de la procédure collective (cf. Cass. com. 18-5-2022 no 20-22.768 F-B : BRDA 12/22 inf. 11 ; Cass. com. 14-6-2023 no 21-24.207 F-B : RJDA 11/23 no 602) ;
- contester l’opposabilité de la déclaration parce qu’elle n’a pas été publiée régulièrement (Cass. com. 15-11-2016 no 14-26.287 FS-PBI : RJDA 2/17 no 120) ou ne l’a été qu’après l’ouverture de la procédure collective du déclarant (Cass. com. 10-3-2021 no 19-21.971 F-P) ;
- demander l’annulation de la déclaration si cette dernière a été faite après la date de cessation des paiements de l’entrepreneur (art. L 632-1, I-13o) ou dans les six mois qui précèdent cette date (art. L 632-1, II).
Par ailleurs, l’entrepreneur peut renoncer à l’insaisissabilité (Cass. com. 17-11-2021 précité). La vente du bien peut aussi intervenir à la demande de l’entrepreneur et sur autorisation du juge-commissaire ou du tribunal lorsqu’elle facilite la réalisation des actifs relevant de la procédure (art. L 642-22, II).
L’impact de la scission du patrimoine
2o L’insaisissabilité de plein droit de la résidence principale a perdu de son intérêt depuis la scission du patrimoine de l’entrepreneur individuel, dans la mesure où, sauf exception, son patrimoine personnel (dont relève sa résidence principale) échappe à l’emprise de la procédure collective dont l’entrepreneur fait l’objet (H. Leyrat, L’insaisissabilité de la résidence principale de l’entrepreneur individuel a-t-elle encore un avenir ? : BRDA 3/24 inf. 30).