Prescription et indivision/succession

L’apparition d’une indivision, qu’elle soit successorale ou non, fait naitre des créances entre les indivisaires eux-mêmes, entre les indivisaires et l’indivision, entre les indivisaires et des tiers et entre les indivisaires et le défunt.

Ces indivisions s’étalent souvent un temps long : quelles sont alors les prescriptions applicables .

Le moyen le plus approprié pour traiter cette question semble être de le faire selon l’identité du rapport créancier/débiteur.

Créance de l’indivisaire contre l’indivision 

Quel intérêt d’être qualifié de créancier de l’indivision ?

Le droit de créance d’un indivisaire contre l’indivision classe l’indivisaire parmi les créanciers de l’indivision ce qui lui permet d’être payé par prélèvement sur l’actif sans attendre le partage (C. civ. art. 815-17 ; Cass. 1e civ. 20-2-2001 n° 98-13.006 , qui autorise une saisie d’un des biens indivis pour payer la créance ; Cass 1e civ. 26-6-2013 n° 12-11.818 F-PB à propos d’une épouse ayant remboursé personnellement partie des échéances des emprunts contractés pour l’achat d’un immeuble indivis).

Dépense de conservation

Un indivisaire qui a conservé à ses frais un bien indivis peut revendiquer une créance sur l’indivision et être payé par prélèvement sur l’actif indivis, avant le partage (C. civ. art. 815-13 et 815-17, al. 1).

Cette créance, immédiatement exigible, se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu les faits lui permettant de l’exercer (C. civ. art. 2224).

L’héritier qui a engagé des dépenses pour la conservation des biens successoraux alors que le règlement de la succession se prolonge devra être vigilant et agir dans les 5 ans, sans attendre le partage.

L’indivisaire qui règle personnellement les échéances d’un emprunt afférent à un immeuble indivis effectue des dépenses nécessaires à la conservation du bien ; elles lui ouvrent un droit de créance contre l’indivision (C. civ. art. 815-13 ; Cass. 1e civ. 7-6-2006 n° 04-11.524 F-PB : RJDA 12/06 inf. 1282 ; Cass. com. 10-2-2015 n° 13-24.659 FS-PB : BPAT 2/15 inf. 59 ; D. 2015 p. 429). 

La créance réclamée contre l’indivision par l’indivisaire qui a remboursé l’emprunt pour l’achat d’un bien indivis est exigible dès le paiement de chaque échéance de l’emprunt immobilier, à partir duquel la prescription quinquennale de l’action en paiement commence à courir. Cass. 1e civ. 14-4-2021 n° 19-21.313 FS-P

Dette de l’indivisaire successoral envers le défunt

Les dettes que l’héritier a contractées envers le défunt (Civ. 1re, 23 mars 1994, n° 92-13.345, Bull. ; D. 1994. 98 ; RTD civ. 1994. 912, obs. J. Patarin) ne sont pas exigibles avant le partage, même si cela n’interdit pas à l’héritier débiteur de préférer les acquitter volontairement pendant l’indivision successorale, notamment pour éviter d’avoir à payer les intérêts au taux légal (C. civ., art. 866).

Les dettes qui résultent du rapport des libéralités ou de leur réduction (C. civ., art. 865, al. 1er) ne sont pas exigibles avant le partage.

C’est souvent motivé par l’impossibilité d’agir qui suspend le cours de la prescription, lequel ne reprend qu’au moment du partage (Civ. 1re, 30 juin 1998, n° 96-13.313, Bull. ; D. 1998. 192 ; RTD civ. 1999. 161, obs. J. Patarin ; JCP 1999, I, 132 n° 2 obs. R. Le Guidec). D’où cette conclusion que c’est l’impossibilité d’agir en paiement qui commande la suspension de la prescription et non sa simple entrée en compte.

Sources:

Mémento Droit de la famille n° 69635

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