Assignation : faut-il invoquer un texte juridique ?

Le principe est la liberté de requalification des faits et actes par le juge sans tenir compte des dénominations retenues par les parties (C. pr. civ., art. 12). Ce principe inquisitoire est tempéré par le respect du contradictoire de l’article 16 du code de procédure civile qui s’impose au juge aussi.

Mais que se passe-t-il si l’assignation (ou les conclusions) ne contient aucun fondement juridique ? D’ailleurs, faut-il en mettre un ?

Fondement juridique non précisé par les parties

Aucune obligation n’étant faite au demandeur de préciser le fondement de son action ; il est fréquent de voir des assignations, surtout en paiement, ne comporter aucune référence à un texte précis et la défense n’argumenter que faiblement, ne pas comparaître ou demander simplement des délais de paiement.

Dans ce cas, le juge est tenu à une obligation d’investigation juridique générale en vertu des dispositions du premier alinéa de l’article 12 du code de procédure civile qui prescrit de trancher le litige conformément à la règle de droit qui lui est applicable. La Cour de cassation juge ainsi qu’en l’absence de toute précision sur le fondement de la demande, le juge doit examiner les faits sous tous leurs aspects juridiques (Cass. com., 31 mars 1981, n° 79-12.672 Cass. 3e civ., 27 juin 2006, n° 05-15.394) et qu’il lui appartient de statuer après avoir donné lui-même un fondement juridique à la demande ou, s’il estime qu’il n’y en a pas, de la rejeter (Cass. 3e civ., 6 févr. 1991, n° 89-14.514 Cass. com., 26 oct. 1993, n° 91-19.086).

Invocation d’un texte précis par les parties

A l’inverse, lorsque les parties invoquent un texte précis, le juge ne peut pas changer l’orientation du procès. Un arrêt célèbre a fixé ce point en refusant au juge la possibilité de changer le fondement de la demande en responsabilité contre l’auteur d’un accident, sans avoir invité les parties à en débattre alors qu’elles avaient expressément désigné le fondement juridique sur lequel elles débattaient (Cass. 2e civ., 27 oct. 1982, n° 81-15.022).

De la même manière, un tribunal ne peut pas déduire de l’examen du dossier que le non-paiement résulte d’une erreur du créancier qui engagerait sa responsabilité, alors que celle-ci n’a pas été mise en cause par le débiteur (Cass. 1re civ., 18 nov. 1986, n° 84-16.372).

Synthèse

L’absence de tout fondement juridique affaiblit les écritures mais force le juge à “faire le travail” de la partie en identifiant le bon moyen de droit.

La présence d’un fondement juridique renforce considérablement les écritures mais vient empêcher le juge de lui substituer un fondement juridique qui serait plus adéquat.

Conclusion : trouvez un bon avocat qui trouvera le bon fondement juridique. Entre un mauvais avocat et l’absence d’avocat, ne prenez pas d’avocat !

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