Les conditions d’exercice de la saisie conservatoire des biens meubles corporels
Comme toute mesure conservatoire , la saisie conservatoire des meubles corporels doit être autorisée par le juge sauf quand la loi en dispense ( CPC exéc., art. R. 511-1 ).
Sans autorisation du juge
Le créancier est dispensé d’autorisation préalable du juge dans les cas suivants:
Titre exécutoire
- Décision de justice
- Ordonnance d’injonction de payer
- Loyer impayé
- Sentence arbitrale
- Défaut de paiement d’un effet de commerce
Avec autorisation du juge
Le juge est saisi par voie de requête non contradictoire ( CPC exéc., art. R. 511-1 ).
En principe, c’est le juge de l’exécution qui est compétent pour autoriser les mesures conservatoires donc la saisie conservatoire des meubles corporels ( CPC exéc., art. L. 511-3 ).
Cependant le président du tribunal de commerce est également compétent à deux conditions :
- la créance relève de la compétence de la juridiction commerciale ;
- la saisie est demandée avant tout procès.
Du point de vue territorial, le juge compétent est celui du lieu où demeure le débiteur ( CPC exéc., art. R. 511-2 ).
Si la saisie conservatoire n’a pas été exécutée dans un délai de 3 mois à compter de l’ordonnance, l’autorisation du juge est caduque ( CPC exéc., art. R. 511-6 ).
La réalisation des opérations de saisie conservatoire sur les meubles corporels
Le commissaire de justice procède à la saisie conservatoire des biens corporels du débiteur.
Les effets de la saisie conservatoire
Les biens saisis deviennent indisponibles (L. 521-1), c’est à dire que le débiteur ne peut ni les aliéner ni les déplacer sous peine de sanction pénale (C. pén., art. 314-5 et 314-6).
Ils restent néanmoins placés sous la garde du débiteur (Art. R. 522-1).
Si le débiteur ne peut pas en disposer, il conserve néanmoins l’usage des biens rendus indisponibles par la saisie à moins qu’il ne s’agisse de biens consomptibles.
Toutefois, le juge de l’exécution peut ordonner sur requête, à tout moment et même avant le début des opérations de saisie, la remise d’un ou plusieurs objets à un séquestre qu’il désigne.
En outre, si parmi les biens saisis se trouve un véhicule terrestre à moteur, celui-ci peut être immobilisé jusqu’à son enlèvement en vue de la vente par l’un des procédés prévus pour l’application de l’article L. 223-2. ( CPC exéc., art. R. 221-19 , par renvoi de CPC exéc., art. R. 522-4)
Si le débiteur ne respecte pas cette indisponibilité, il s’expose à des sanctions pénales
Le créancier n’a donc pas le droit d’utiliser ou de déplacer les biens saisis.
L’assignation en obtention d’un titre exécutoire en paiement dans le mois
La saisie conservatoire n’est nullement une fin en soi et se présente d’une part, comme une prise de garantie et d’autre part, comme un soutien à l’exécution. Elle ne constitue qu’une mesure transitoire, donc provisoire, qui appelle une transformation en l’absence de réaction du débiteur.
Dès lors, l’issue peut être double :
- soit le créancier poursuit la procédure en obtenant un titre exécutoire, qui tend à faire reconnaître sa créance et permet de convertir la saisie conservatoire en acte d’exécution,
- soit le créancier se heurte à la caducité de la mesure si la procédure n’est pas poursuivie dans le délai imparti.
Dans le mois qui suit l’exécution de la mesure conservatoire, le créancier doit introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire, sauf si la mesure conservatoire venait à être pratiquée en vertu d’un titre exécutoire (C. pr. exéc., art. R. 511-7). En effet, le plus souvent, le créancier ne dispose pas encore de jugement ou de titre judiciaire condamnant son débiteur au paiement des sommes qui font l’objet de la garantie sollicitée. Il convient donc qu’il en obtienne un dans les meilleurs délais.
La sanction du non-respect du délai d’un mois est la caducité de la mesure prise et la mainlevée de la saisie est ordonnée par le juge en application des articles R. 512-1 à R. 512-2 du code des procédures civiles d’exécution.
Il s’agit d’introduire dans le mois (et non d’obtenir) une mesure quelconque tendant à faire reconnaître la créance du créancier et d’obtenir un titre exécutoire en paiement quelle que soit la nature de ce titre exécutoire ou sa forme :
- assignation en paiement au fond ou en référé,
- une procédure d’injonction de payer,
- la signification d’un certificat de non-paiement d’un chèque qui permet, passé le délai de 15 jours, la rédaction du titre exécutoire par l’huissier (devenu commissaire) de justice.
- Une action pénale préalable à l’obtention d’un jugement de condamnation permet également de justifier de l’accomplissement des formalités au sens de l’article R. 511-7 du code des procédures civiles d’exécution, dès lors que cette action se rapporte exclusivement à l’infraction reprochée et permet d’établir la causalité des faits incriminés (Cass. com., 27 juin 2000, n° 98-15.911, n° 1470 FS – P et Cass. 2e civ., 9 sept. 2021, n° 20-10.581).
La réalisation de la conversion de la saisie conservatoire des biens meubles corporels en saisie-vente une fois le titre exécutoire obtenu
Le procès-verbal de conversion
Aucun délai n’est fixé au créancier pour procéder à cet acte de conversion.
S’il dispose d’un titre exécutoire, il peut donc immédiatement y procéder.
S’il ne dispose pas de titre exécutoire, il doit attendre d’obtenir le titre exécutoire pour procéder à la conversion (Article R. 522-7 du code des procédures civiles) : les deux actes seront alors signifiés ensemble. Lorsque le créancier a obtenu un titre exécutoire constatant l’existence de sa créance, il peut convertir la mesure conservatoire en mesure d’exécution, ici, en saisie-vente, sans intervention du juge par un simple acte de conversion rédigé par le commissaire de justice rédige.
Le procès-verbal de vérification des biens saisis
Aux termes de l’article R. 522-8 CPCE, à l’expiration d’un délai de huit jours à compter de la date de l’acte de conversion et en l’absence de paiement par le débiteur, le commissaire de justice procède à la vérification des biens saisis.
Ce PV de vérification fait deux choses :
- Il dresse acte des biens manquants ou dégradés.
- Il ouvre le délai d’un mois au débiteur pour mettre en œuvre la vente amiable des biens saisis, initialement conservatoirement et désormais aux fins de vente.
Pendant le délai d’un mois, ouvert par la régularisation du procès-verbal de vérification, le débiteur peut formuler des propositions de vente amiable.
A défaut de proposition, il est procédé à la vente forcée comme en matière de saisie-vente de droit commun (Art. R. 522-10).
Dans le cas où les biens ne se retrouvent plus au lieu où ils avaient été saisis, il est fait injonction au débiteur d’informer le commissaire de justice dans un délai de 8 jours du lieu où ils se trouvent.
Si le débiteur ne répond pas, le créancier peut saisir le juge de l’exécution pour lui demander d’ordonner la remise de ces informations sous astreinte, sans préjudice d’une action pénale en cas de détournement de biens saisis ( CPC exéc., art. R. 522-9 ).
La vente amiable
Le débiteur peut vendre à l’amiable les biens saisis dans le délai d’un mois à compter du PV de vérification : ce sont les règles de la saisie -vente énoncées aux articles R. 221-30 à R. 221-32 qui s’appliquent.
Si la vente amiable n’intervient pas dans le délai prévu, il est procédé à la vente forcée des biens saisis (CPC exéc., art. R. 522-10).
La vente forcée aux enchères publiques
La saisie-vente a pour vocation d’aboutir à la vente des biens mobiliers corporels saisis à défaut du règlement de l’intégralité de la créance par le débiteur.
Il faut alors mettre en œuvre les articles R. 221-33 à R. 221-39 du code des procédures civiles d’exécution qui organisent les formalités de la vente forcée et l’adjudication.
Il faut accomplir les formalités préalables avec publicité et ensuite procéder à la vente par un commissaire de justice choisi par le créancier aux enchères publiques.
Schéma récapitulatif
Quelle est la différence entre une saisie conservatoire et une saisie vente ?
Celui qui détient un titre exécutoire peut pratiquer directement une saisie -vente. Il peut cependant être utile de la faire précéder d’une saisie conservatoire de manière que les biens soient indisponibles entre le commandement de saisie -vente et la réalisation des opérations de saisie.