Dirigeant de fait : preuves et sanctions

Comment prouver la gérance de fait ?

La qualification de dirigeant de fait repose sur un faisceau d’indices concordants établissant que l’intéressé participe de façon active et en toute indépendance à la gestion sociale et exerce un contrôle constant sur la marche de l’entreprise.

Le dirigeant de fait est celui qui exerce une activité positive de gestion et de direction en toute souveraineté et indépendance (Cass. com. 10-1-2013 no 10-28.067 F-D : RJDA 4/12 no 427, 1e espèce). 

Un rôle concret dans la gestion sociale

Ainsi, il a été jugé, dans un cas où le gérant de droit d’une société demandait à une personne extérieure son avis sur toutes les décisions importantes et agissait comme un simple exécutant, que cette personne devait être qualifiée de dirigeant de fait (Cass. com. 2-6-2021 no 20-13.735 F-D : RJDA 10/21 no 661). 

L’effectivité de la direction de droit n’empêche pas l’existence, en parallèle, d’une direction de fait (CA Paris 19-4-1995 no 93-15695 ; CA Rouen 3-3-2011 no 10-1471 : RJDA 8-9/11 no 726).

Dans une SAS, si le conseil de surveillance exerce par essence un contrôle sur les organes de la société, il n’a normalement pas le pouvoir de s’immiscer dans la gestion des dirigeants sociaux. Il n’est donc pas surprenant qu’il soit considéré comme dirigeant de fait si des décisions du dirigeant de droit sont soumises à son aval, alors en outre que cette autorisation préalable n’est pas une simple pratique mais une obligation statutaire.

Le fait que les statuts d’une SAS soumettent certaines décisions du directoire à l’autorisation du conseil de surveillance constitue un indice de ce que les membres de ce conseil de surveillance exercent en réalité une fonction de direction de la société. Cass. 2e civ. 1-2-2024 no 21-25.175 F-D, Sté Financière X c/ Urssaf d’Ile-de-France)

  • La réalisation d’actes positifs de gestion et plus généralement le comportement de l’intéressé,
  • la détention de pouvoirs étendus, notamment d’une procuration sur les comptes bancaires de la société, 
  • l’absence de lien de subordination à l’égard du dirigeant de droit.
  • La situation, la rémunération et le rôle de l’intéressé sont d’ailleurs souvent comparés avec ceux du dirigeant de droit pour démontrer qu’il était en réalité le véritable maître de l’affaire 
  • l’importance du rôle joué par l’intéressé dans la société, importance elle-même déduite du déclin de l’activité de la société pendant son incarcération (CA Paris 25-1-2024 no 23/00654) : La cessation de toute activité de la société à la suite de l’incarcération de son directeur technique constitue un indice permettant de qualifier ce dernier de dirigeant de fait. La gestion de fait par un directeur technique déduite de la déconfiture de la société en son absence.

Des circonstances secondaires 

En dehors de ce rôle concret dans la gestion sociale, des circonstances secondaires sont souvent prises en compte par les tribunaux. Si elles ne suffisent pas à elles seules à qualifier l’intéressé de dirigeant de fait, elles viennent accréditer le fait qu’il a un rôle anormalement important au sein de la société. Il en est régulièrement ainsi de

Prescription

La Cour de cassation a rappelé que cette prescription triennale ne concerne que les agissements commis par les dirigeants de droit et non ceux commis par un dirigeant de fait. (Cass. com. 12 avril 2016 no 14-12.894 (no 365 F-D), D. c/ Sté VMK Assur NV)

Confirmation de jurisprudence (Cass. com. 30-3-2010 no 08-17.841 : RJDA 7/10 no 760 ). Le régime spécifique de responsabilité civile prévu par le droit des sociétés (C. com. art. L 223-22 s. pour les SARL et art. L 225-251 s. pour les sociétés par actions) ne concerne que les dirigeants de droit (Cass. com. 21-3-1995 no 93-13.721 : RJDA 7/95 no 858 ).

Les dirigeants de fait sont en conséquence soumis au droit commun de la responsabilité extra-contractuelle de l’article 1382 du Code civil (art. 1240 à compter du 1er octobre 2016) qui, sur le terrain de la prescription, est plus rigoureux puisque l’action en responsabilité se prescrit par cinq ans à compter du jour où celui qui agit a connu ou aurait dû connaître la faute du dirigeant (C. civ. art. 2224).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *