Comment écarter une clause limitative de responsabilité ?
Pour écarter une clause limitative de responsabilité, il suffit d’une faute lourde non intentionnelle. En matière contractuelle, la faute lourde qui empêche le débiteur de se prévaloir d’une clause limitative de responsabilité en cas d’inexécution n’a pas à être intentionnelle ; il suffit d’un comportement dénotant son inaptitude.
Cass. com. 26-6-2024 no 23-14.306 F-D, Sté Fonderie et mécanique générale castelbriantaise c/ ADP Europe
Le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l’inexécution est due à un dol (C. civ. ex-art. 1150 au visa duquel l’arrêt commenté est rendu). Lors de la réforme du droit des contrats de 2016, le principe a été expressément étendu en cas de faute lourde (C. civ. art. 1231-3).
En application de ces dispositions, les clauses limitant ou excluant la responsabilité du débiteur d’une obligation contractuelle en cas d’inexécution ou d’exécution tardive ou défectueuse sont écartées lorsque le débiteur commet une faute dolosive ou lourde (jurisprudence constante, dont Cass. com. 4-3-2008 no 07-11.790 FS-PB : RJDA 6/08 pour la faute dolosive et Cass. com. 24-5-2023 no 22-21.896 F-D pour la faute lourde).
Si la faute dolosive supposait initialement l’intention de causer le dommage, tel n’est plus le cas depuis longtemps : cette faute est caractérisée lorsque le débiteur refuse délibérément d’exécuter ses obligations, même s’il n’a pas l’intention de nuire à son cocontractant (Cass. 1e civ. 4-2-1969 no 67-11.387 : Bull. civ. I no 60 ; Cass. com. 19-1-1993 no 91-11.805 P : Bull. civ. IV no 24 ; Cass. com. 4-3-2008 précité ; Cass. 1e civ. 31-1-2018 no 16-25.522 F-D). Une telle faute lui interdit en outre de se prévaloir de la limitation légale de responsabilité des articles précités. La faute dolosive n’implique pas l’intention de nuire
La faute lourde consiste en une négligence d’une extrême gravité confinant au dol et dénotant l’inaptitude du débiteur à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il a acceptée (notamment, Cass. com. 3-4-1990 no 88-14.871 P : Bull. civ. IV no 108 ; Cass. com. 11-7-1995 no 93-17.477 P : RJDA 1/96 no 60 ; Cass. com. 8-2-2023 no 21-17.705, 21-11.415 F-B). L’absence de preuve du caractère intentionnel de la faute commise par le débiteur n’exclut donc pas l’existence d’une faute lourde. La cour d’appel de renvoi devra examiner en l’espèce si la gravité du manquement, même non intentionnel, commis par le prestataire permettait de retenir une faute lourde à l’encontre de celui-ci et de le priver ainsi du bénéfice du plafond contractuel d’indemnisation.
La faute lourde, assimilable au dol, empêche le contractant auquel elle est imputable de limiter la réparation du préjudice qu’il a causé aux dommages prévus ou prévisibles lors du contrat et de s’en affranchir par une clause de non-responsabilité. Constitue une faute lourde le comportement d’une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l’inaptitude du débiteur de l’obligation à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il avait acceptée. L’existence d’une faute lourde n’exige pas la preuve de son caractère intentionnel.