Fondement juridique
La radiation de l’appel pour défaut d’exécution trouve son fondement à l’article 524 du Code de procédure civile.
Dans quelles circonstances peut-elle être prononcée ?
La radiation peut être demandée lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée et que l’appelant :
- Ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel ;
- N’a pas procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l’article 521 du Code de procédure civile.
Qui peut demander la radiation et auprès de qui ?
La demande de radiation peut être formulée par l’intimé auprès :
- Du Premier Président de la Cour d’appel, s’il n’est pas encore saisi ;
- Du Conseiller de la mise en état, dès lors qu’il est saisi.
L’intimé doit présenter sa demande avant l’expiration des délais prescrits aux articles 906-2, 909, 910 et 911 du Code de procédure civile, sous peine d’irrecevabilité d’office.
Le juge est-il obligé de prononcer la radiation ?
Non. Le texte prévoit qu’il peut la prononcer, et non qu’il doit le faire.
Il doit, avant toute décision, recueillir les observations des parties.
Comment l’appelant peut-il éviter la radiation ?
L’appelant peut échapper à la radiation en démontrant :
- Que l’exécution aurait des conséquences manifestement excessives ;
- Qu’il est dans l’impossibilité d’exécuter la décision.
Le juge ne peut en aucun cas examiner les appels principaux, incidents ou provoqués avant que la question de l’exécution ne soit tranchée.
Quelle est la nature de l’ordonnance rendue ?
L’ordonnance prononçant la radiation constitue une mesure d’administration judiciaire, insusceptible de recours.
Elle est notifiée par le greffe aux parties et à leurs représentants par lettre simple.
Effets de la demande de radiation sur les délais
Délais suspendus
- Les délais impartis à l’intimé par les articles 906-2, 909, 910 et 911 du Code de procédure civile.
Délais non suspendus
- Les délais impartis à l’appelant par les articles 906-2, 908 et 911 du Code de procédure civile.
Reprise des délais
Les délais recommencent à courir à compter de la notification de la décision autorisant la réinscription de l’affaire au rôle ou rejetant la demande de radiation.
Réinscription au rôle de la Cour
Le Premier Président ou le Conseiller de la mise en état autorise la réinscription dès lors que l’appelant justifie de l’exécution de la décision attaquée, sauf en cas de péremption constatée.
Radiation et péremption
Si la radiation est ordonnée, le délai de péremption court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation.
Il est interrompu par tout acte manifestant sans équivoque la volonté d’exécuter la décision frappée d’appel.
Si l’instance est périmée, le Premier Président ou le Conseiller de la mise en état peut, d’office ou à la demande des parties, constater la péremption après avoir recueilli leurs observations.
Mon avis personnel sur la radiation pour inexécution
La radiation de l’appel pour défaut d’exécution constitue une atteinte inacceptable au droit à un recours effectif et au double degré de juridiction, principes fondamentaux garantis par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et le droit interne.
En conditionnant l’examen d’un appel à l’exécution préalable d’une décision de première instance, l’article 526 du Code de procédure civile impose à l’appelant une charge disproportionnée, qui peut le priver de son droit de contester une décision défavorable.
Cette exigence est particulièrement critiquable lorsque la décision frappée d’appel est assortie de l’exécution provisoire, alors même que son bien-fondé reste contestable. Elle crée un déséquilibre procédural en faveur de l’intimé, qui bénéficie immédiatement des effets du jugement, alors que l’appelant peut se retrouver privé de son droit d’appel faute de moyens pour exécuter.
Or, le droit au double degré de juridiction suppose que toute partie puisse voir son affaire examinée sur le fond par une juridiction supérieure, sans restrictions excessives. La radiation pour inexécution se transforme ainsi en un véritable obstacle procédural, détournant l’exécution provisoire de son objectif initial pour en faire un mécanisme d’obstruction à l’accès au juge d’appel.
Une solution plus respectueuse des droits de la défense consisterait à privilégier des garanties alternatives, telles que :
- Le dépôt d’une consignation, permettant de préserver les droits de l’intimé tout en garantissant l’accès à l’appel ;
- La limitation de l’exécution provisoire aux cas où elle ne compromet pas irrémédiablement les droits de l’appelant.
Plutôt que de priver un justiciable de son droit d’appel, il conviendrait d’aménager des solutions plus équilibrées, conciliant l’exigence d’exécution et le respect du droit à un recours effectif.