Le divorce : tout comprendre

Contrairement à la nullité du mariage, le divorce permet de mettre fin à un mariage qui était valide, mais dans lequel les deux époux ou l’un seulement ne veulent/veut plus demeurer.

2.1. Les voies du divorce

Les voies du divorce sont au nombre de quatre.

2.1.1. Le divorce par consentement mutuel

Le mariage que les époux ont formé par la concordance de leur volonté peut être dissous par un nouvel accord de volonté en sens inverse contrôlé et validé par le juge. La particularité de ce type de divorce réside en ce que les époux s’entendent, non seulement pour mettre fin à leur union, mais aussi sur les conséquences de cette rupture.

Avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, le recours au juge était indispensable afin que celui-ci homologue la convention réglant les conséquences de la rupture proposée par les époux.

La loi de 2016 a sensiblement modifié la procédure de divorce par consentement mutuel. Désormais, la convention de divorce prend la forme d’un acte sous signature privée déposée chez un notaire. Elle n’est plus soumise à l’homologation judiciaire, à moins qu’un enfant mineur du couple demande à être entendu par un juge (C. civ., art. 229-2, 1°).

Le divorce par consentement mutuel est l’unique cas de divorce dans lequel les époux peuvent divorcer sans avoir à engager de procédure judiciaire.

Chaque époux doit être assisté par un avocat. Il n’est pas possible que les époux fassent appel au même avocat. Les deux avocats contresignent la convention (C. civ., art 229-1).

Puisque le consentement des époux est essentiel à deux points de vue, il semble naturel que la loi ne permette pas à une personne placée sous un régime de protection de divorcer par le recours à ce type de divorce (C. civ., art. 229-2, 2° et 249-4).

2.1.2. Le divorce par acceptation du principe de la rupture

Le divorce par acceptation du principe de la rupture a un point commun avec le divorce par consentement mutuel : les époux s’entendent sur le fait de mettre fin à leur union. En revanche, ce deuxième cas de divorce s’éloigne du premier en ce que les époux n’ont pas trouvé d’accord sur les conséquences de cette rupture (C. civ., art. 233). Après avoir acquis la conviction de la réalité et du sérieux de la volonté des époux de divorcer, le juge doit donc statuer sur les conséquences du divorce (C. civ., art. 234).

Remarque : La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a levé l’interdiction faite aux majeurs protégés de recourir à ce type de divorce. Leur consentement est certes nécessaire, mais celui-ci a une portée bien moindre que dans l’hypothèse d’un divorce par consentement mutuel (puisqu’il ne porte pas sur les effets), ce qui peut expliquer que l’interdiction soit levée pour l’un des types de divorce mais non pour l’autre.

2.1.3. Le divorce pour faute

Contrairement aux deux cas précédents, le divorce pour faute peut être prononcé alors même que l’un des époux ne serait pas d’accord pour divorcer. Puisqu’il s’agit d’un mode de dissolution possiblement unilatéral, celui-ci est conditionné par la preuve d’une faute commise par l’autre époux (C. civ., art. 242).

Remarque : De ce qui vient d’être dit, il faut induire que le mariage ne peut être librement dissous du seul fait de la volonté de l’un des époux. Puisque le mariage est un engagement, on ne peut en principe pas s’en défaire unilatéralement, quand bien même on le souhaiterait résolument. Il n’y a pas de légitimité à y parvenir sans obtenir l’accord de l’autre époux sauf à démontrer que cet autre époux a par sa faute rendu insupportable le maintien de l’union. Dans ce dernier cas en effet, il est logique de ne pas tenir compte de la volonté de l’époux fautif de demeurer dans un mariage qu’il a rendu intenable pour l’autre époux. Puisqu’il a fauté, l’autre époux peut se passer de son consentement qui est en principe nécessaire.

Il est vrai que l’existence du divorce pour altération définitive du lien conjugal conduit à relativiser sensiblement cette remarque sans pour autant lui faire perdre toute sa pertinence. En effet, dans cette hypothèse, l’obtention du divorce contre la volonté de l’un des époux est certes possible, mais elle est conditionnée par l’écoulement d’un délai de 1 an de séparation.

La faute doit d’abord pouvoir être imputée à l’un des époux, ce qui implique d’une part qu’elle soit le fait personnel de l’époux et non le fait d’un tiers, et d’autre part, que l’époux en question possède une volonté éclairée et libre.

La faute doit ensuite avoir un caractère conjugal, c’est-à-dire qu’elle devra nécessairement s’incarner dans l’inexécution d’une obligation née du mariage ou dans la violation de l’un des devoirs des époux. Ainsi par exemple, l’adultère est une faute car il correspond à la violation du devoir de fidélité. De même, le fait de quitter le domicile familial est une faute car il correspond à un manquement au devoir de communauté de vie. Peuvent aussi être cités sans prétention à l’exhaustivité : les violences, les injures, la communication d’une maladie sexuellement transmissible, l’interruption de grossesse à l’insu du mari, le désintérêt pour la famille, le changement de sexe (CA Nîmes, 7 juin 2000 : Dr. famille 2001, comm. 4, Lécuyer ; LPA 12 avr. 2001, note Massip ; RTD civ. 2001, p. 335, obs. Hauser), etc. Pour d’autres exemples, Fiche pédagogique n° 3219 : Le mariage.

La faute doit également être affectée d’un caractère de gravité ou de répétition. La violation du devoir conjugal doit être grave ou alors renouvelée.

La faute doit enfin rendre intolérable le maintien de la vie commune. Cette condition permet d’éviter des actions en divorce qui reposeraient sur des fautes passagères qui pourraient être aisément pardonnées. Il ne s’agit en effet pas de punir le conjoint pour avoir fauté mais plutôt de mettre fin à une union devenue intolérable. Toutefois, depuis des arrêts de la Cour de cassation en date du 30 novembre 2000 et du 11 janvier 2005, la seule constatation de l’existence d’un manquement grave ou renouvelé conduit à retenir que la double condition de l’article 242 est remplie (Cass. 2e civ., 30 nov. 2000, n° 99-10.923 :– Cass. 1re civ., 11 janv. 2005, n° 03-16.451).

Le juge dispose d’une large marge de manœuvre dans l’appréciation de ces conditions.

2.1.4. Le divorce pour altération définitive du lien conjugal

Parfois, un mariage n’a de mariage plus que le nom. Dans les faits, celui-ci se réduit à une coquille-vide : les époux vivent séparés mais les trois autres types de divorce leur demeurent interdits puisque l’un des deux refuse la désunion souhaitée et parce que l’époux souhaitant divorcer n’est pas en mesure de rapporter la preuve de la faute de son conjoint.

La loi entend tirer les conséquences de cette désunion de fait en permettant à l’époux ne souhaitant pas demeurer dans un mariage qu’il n’assume plus, d’en sortir.

L’altération définitive du lien conjugal peut résulter de deux situations :

  • la séparation des époux depuis 1 an lors de la demande en divorce (C. civ., art. 238, al. 1). Traditionnellement, il est admis que cette situation est composée de deux éléments constitutifs. D’une part, d’un élément matériel : la fin de la communauté de vie entre époux, autrement dit la cessation de la cohabitation. D’autre part, d’un élément moral : l’intention de vivre séparément d’au moins un époux, ce qui n’implique pas nécessairement la disparition de tout sentiment affectif ;
  • une demande en divorce pour altération définitive du lien conjugal et une autre demande en divorce ont été concurremment présentées (C. civ., art. 238, al. 3). Le fait que deux demandes aient été présentées témoigne suffisamment de ce que le lien conjugal semble définitivement altéré. Dans ce cas donc, il n’est pas nécessaire que le délai d’un an se soit écoulé.

2.2. Les effets du divorce : quelles conséquences ?

Le mariage produit à l’égard des époux, des effets à la fois personnels et pécuniaires. Symétriquement, en sens inverse, le divorce produit lui aussi ces deux types d’effets.

2.2.1. Les effets de nature personnelle

Le divorce met fin au mariage pour l’avenir, ce qui le distingue de la nullité. Les obligations et droits issus du mariage meurent avec lui, ce qui n’entraîne en aucune façon la disparition des devoirs des parents à l’égard de leurs enfants. Au couple conjugal survit le couple parental.

L’époux divorcé ne peut plus porter le nom de son ancien conjoint sauf si ce dernier l’y autorise ou si le juge le lui autorise car il justifie d’un intérêt particulier pour lui ou pour les enfants (C. civ., art. 264).

Puisque le lien d’alliance disparaît, l’obligation alimentaire entre alliés s’éteint elle aussi, à la différence de certains empêchements à mariage qui subsistent en ligne directe.

Chacun des deux époux a la liberté de contracter un nouveau mariage (C. civ., art. 263).

Remarque : Les effets de nature personnelle du divorce dépassent le seul cadre du droit civil. L’illustre fort bien le cas de l’immunité familiale entre époux qui prend fin par l’effet du divorce. Cette immunité interdit notamment d’exercer des poursuites pénales contre l’auteur d’un vol, d’une extorsion, d’un chantage, d’une escroquerie ou d’un abus de confiance si l’infraction a été commise au préjudice de son conjoint (C. pén., art. 311-12). Effet du mariage, elle disparaît avec lui.

2.2.2. Les effets de nature pécuniaire : la fixation de la prestation compensatoire

C’est ce point là qui intéresse la plupart des justiciables : combien va me coûter le divorce (généralement l’homme) / combien je vais obtenir (généralement la femme).

La vocation successorale entre époux disparaît et le régime matrimonial est liquidé.

Si le divorce crée entre les époux une disparité dans leurs conditions de vie respectives, celle-ci sera compensée par l’octroi d’une prestation compensatoire (C. civ., art. 270, al. 1). L’époux qui bénéficie de cette disparité devra alors verser une compensation sous forme de capital, en principe, ou de rente à l’époux qui en est victime. Hors divorce par consentement mutuel où les époux doivent s’entendre sur cette potentielle prestation, celle-ci est décidée par le juge et s’apprécie de manière objective, c’est-à-dire sans considération de la répartition des torts. Toutefois, elle pourra être refusée sur le fondement de l’équité, soit en considération de critères posés par l’article 271 du Code civil, soit lorsque le divorce est un divorce pour faute prononcé aux torts exclusifs de l’époux qui sollicite la prestation compensatoire et cela compte tenu des circonstances particulières de la rupture (C. civ., art. 270, al. 3).

La Cour de cassation a estimé que pour apprécier la disparité résultant de la rupture du lien conjugal et ainsi fixer le montant de la prestation compensatoire, il ne doit pas être tenu compte de l’origine des biens composant l’actif de la communauté (Cass. 1re civ., 21 oct. 2015, n° 14-25.316 : JurisData n° 2015-023500). Le juge n’a pas davantage à tenir compte de la vie commune antérieure au mariage pour déterminer les ressources et les besoins des époux en vue de la fixation de la prestation compensatoire (Cass. 1re civ., 5 déc. 2018, n° 17-28.345).

Dommages et intérêts entre époux : quelle indemnisation obtenir ?

Principe

À l’occasion d’un divorce, des dommages et intérêts peuvent être demandés sur deux fondements juridiques distincts, l’un propre aux conséquences du divorce pour les époux (C. civ. art. 266), l’autre spécifique à la responsabilité délictuelle (C. civ. art. 1240).

Les dommages-intérêts prévus par l’article 266 du Code civil réparent le préjudice causé par la rupture du lien conjugal dans le cadre du divorce, tandis que ceux prévus par l’article 1240 (anciennement art. 1382) du même Code indemnisent le préjudice résultant de toute autre circonstance. Aussi, doit être cassé l’arrêt ayant condamné sur le fondement de l’article 266 un époux à verser 3 000 € de dommages-intérêts à son épouse à la suite d’agressions physiques l’ayant contrainte à quitter son lieu de vie habituel, la cour d’appel ayant statué par des motifs impropres à caractériser les conséquences d’une particulière gravité subies par l’épouse du fait de la dissolution du mariage (Cass. 1e civ. 9-6-2022 n° 20-22.746 F-D).

Si le demandeur invoque l’article 266 pour un préjudice qui relève de l’article 1240, le juge ne peut pas faire droit à la demande en rectifiant le fondement (Cass. 1e civ. 6-3-2013 n° 12-12.338 F-D). Si le fondement de la demande n’est pas indiqué, le juge doit statuer sur le fondement de la responsabilité délictuelle, c’est-à-dire au regard de l’article 1240 du Code civil (Cass. 1e civ. 26-6-2013 n° 12-14.463 F-D). Dans tous les cas, il doit préciser le fondement en vertu duquel il condamne (Cass. 1e civ. 3-12-2008 n° 07-14.609 F-PB).

Dans les deux cas, en matière d’impôt sur le revenu, les dommages et intérêts n’ouvrent droit ni à déduction ni à réduction d’impôt pour l’époux débiteur. Corrélativement, ils ne sont pas imposables entre les mains de l’époux bénéficiaire.

Article 266 du Code civil

L’article 266 du Code civil permet d’obtenir des dommages et intérêts spécifiquement liés au divorce. Peuvent y prétendre :

  • – l’époux défendeur à un divorce pour altération définitive du lien conjugal s’il n’a formé aucune demande reconventionnelle en divorce ;
  • – l’époux qui obtient (sur demande principale ou reconventionnelle) le divorce aux torts exclusifs de son conjoint.

La demande de dommages et intérêts doit nécessairement être présentée à l’occasion du divorce. Elle peut l’être pour la première fois en appel, à condition que le divorce ne soit pas définitivement acquis (Cass. 2e civ. 23-5-2001 n° 99-15.459 ; Cass. 1e civ. 13-2-2013 n° 11-28.671 F-D).

Pour être indemnisé, le préjudice doit répondre à une double condition : être particulièrement grave et résulter de la dissolution du mariage. La Cour de cassation y veille et rappelle régulièrement que l’article 266 vise à réparer le préjudice résultant de la rupture du lien conjugal tandis que l’article 1240 du même Code permet d’indemniser le préjudice résultant de toute autre circonstance (Cass. 1e civ. 6-7-2005 n° 04-10.081 F-PB), notamment du comportement d’un époux durant le mariage.

L’article 266 du Code civil est utilement invoqué lorsque la rupture du mariage s’accompagne de circonstances particulières, par exemple lorsque :

  • – l’un des époux abandonne son conjoint en lui laissant la charge de leur fille, jeune adulte handicapée (Cass. 1e civ. 17-2-2004 n° 02-13.061 F-D) ou de deux jeunes enfants dont l’un présente des troubles de la personnalité, contraignant celui qui reste à faire des choix professionnels au détriment de sa carrière pour s’en occuper (Cass. 1e civ. 12-9-2012 n° 11-12.140 F-D) ;
  • – la défection du mari qui travaillait avec son épouse a déséquilibré l’activité du poney club exploité ensemble (Cass. 1e civ. 9-2-2011 n° 10-14.853 F-D) ;
  • – l’épouse souffre, plusieurs années après le départ de son époux du domicile conjugal, d’un syndrome anxio-dépressif réactionnel, leur vie commune ayant duré 24 ans (Cass. 1e civ. 22-6-2022 n° 20-21.201 F-D) ;
  • – le conjoint est diminué par la maladie et psychologiquement fragile (CA Paris 9-9-2010 n° 08/20954).
  • l’épouse a subi le caractère public de la liaison de son mari, son éviction du magasin qu’elle dirigeait et la scission apparue au sein de la cellule familiale résultant du comportement fautif du père (Cass. 2e civ. 20-6-2002 n° 00-19.027 F-D) ;
  • l’épouse a été abandonnée au profit d’une nouvelle compagne après 18 années de mariage (Cass. 1e civ. 3-2-2010 n° 09-10.109 F-D : BPAT 2/10 inf. 86 qui applique l’art. 266 dans sa version antérieure à la loi de 2004).

À l’inverse, l’article 266 du Code civil est exclu lorsque le préjudice invoqué résulte de la disparité des conditions de vie créée par le divorce, cette disparité étant compensée par l’allocation d’une prestation compensatoire. Il a aussi été exclu dans les cas :

  • – du départ soudain du domicile conjugal par l’épouse qui a immédiatement entretenu une relation adultère (Cass. 1e civ. 25-1-2005 n° 02-16.255 F-D) ;
  • – d’abandon après 30 ans de vie commune, en laissant le conjoint avec de très faibles ressources (Cass. 1e civ. 9-1-2007 n° 06-10.871 F-PB), dans le même sens pour un abandon après 39 ans de mariage, le mari recherchant une nouvelle compagne (Cass. 1e civ. 1-7-2009 n° 08-17.825 FS-PB : BPAT 5/09 inf. 183) ;
  • – de harcèlement moral au cours du mariage, de faux documents produits dans la procédure de divorce et de relation adultère avant le prononcé de l’ordonnance de non-conciliation (Cass. 1e civ. 19-3-2014 n° 13-14.790 F-D) ;
  • – de l’attitude de dénigrement adoptée par le mari (Cass. 1e civ. 15-5-2019 n° 18-16.055 F-D) ;
  • – de la naissance d’un enfant adultérin (Cass. 2e civ. 28-9-2000 n° 98-22.952) ;
  • – de refus du mari de ramener les enfants à l’issue de son droit de visite (Cass. 2e civ. 11-4-2002 n° 00-13.417 F-D) ;
  • – où l’ex a été privé pendant 11 mois de ses enfants par son épouse du fait de l’installation de celle-ci avec eux en Guadeloupe en dépit d’une ordonnance de non-conciliation fixant leur résidence au domicile conjugal (Cass. 1e civ. 20-9-2023 n° 21-24.787 F-D).

Dans des situations proches, l’article 1240 du Code civil, lui, a pu être efficacement mobilisé.

Article 1240 du Code civil

Des dommages et intérêts fondés sur l’article 1240 du Code civil, c’est-à-dire selon les règles de droit commun de la responsabilité civile délictuelle, peuvent être demandés dans toutes les procédures de divorce. Des dommages et intérêts peuvent par exemple être alloués à un époux alors même que le divorce est prononcé aux torts partagés (en ce sens, Cass. 1e civ. 22-5-2007 n° 06-18.539 F-D ; Cass. 1e civ. 12-6-2013 n° 12-18.211 F-D).

La demande peut être présentée soit à l’occasion du divorce, soit postérieurement.

Le préjudice réparé sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle est celui qui résulte de toute circonstance autre que la dissolution du mariage. L’objectif est essentiellement ici de réparer les fautes commises par le conjoint pendant le mariage.

Par exemple, justifient des dommages et intérêts :

  • – la liaison adultère publiquement affichée par le mari, les coups et blessures portés par lui et le congédiement brutal par le mari de son épouse sans lettre de licenciement (Cass. 1e civ. 22-3-2005 n° 04-11.942 F-PB) ;
  • – le caractère particulièrement injurieux de la liaison adultère publiquement affichée par l’épouse ainsi que l’internement d’office subi par le mari à la demande de celle-ci (Cass. 1e civ. 11-2-2009 n° 08-12.032 F-D) ;
  • – le fait d’avoir été privé de ses enfants au cours de la procédure en raison de l’attitude du conjoint (Cass. 1e civ. 14-1-2009 n° 08-10.538 F-D) ;
  • – l’obstruction d’un époux à la mesure d’expertise visant à l’évaluation de son patrimoine (Cass. 1e civ. 17-3-2010 n° 09-11.511 F-D : BPAT 3/10 inf. 156) ;
  • – l’absence de relations sexuelles pendant plusieurs années non justifiée par des problèmes de santé (CA Aix-en-Provence 3-5-2011 n° 09/05752, ch. 6 B : BPAT 1/12 inf. 10) ;
  • – le fait pour l’épouse d’avoir imité la signature de son mari pour ouvrir plusieurs comptes en banque et souscrire de nombreux crédits à la consommation à ses fins personnelles, le mari devant continuer à subir les poursuites judiciaires des créanciers et incidents de paiement (Cass. 1e civ. 13-12-2017 n° 16-25.256 F-PB : BPAT 1/18 inf. 8).

À l’occasion d’un divorce pour faute ou pour altération définitive du lien conjugal, l’article 1240 peut être invoqué concomitamment avec l’article 266 du Code civil, à condition que l’époux demandeur prouve l’existence de deux préjudices distincts (en ce sens, Cass. 2e civ. 10-12-1998 n° 97-15.252).

Sort des donations entre époux et des avantages matrimoniaux

Principe

Le sort des donations et avantages matrimoniaux est totalement déconnecté des éventuels torts des époux dans la séparation.

Pour résumer, les donations et avantages matrimoniaux qui ont produit leurs effets avant le divorce sont maintenus. Ceux qui n’ont pas encore produit leurs effets sont révoqués de plein droit.

Ce dispositif présente un double avantage :

  • il favorise la pacification des rapports entre les époux, puisque le sort des donations et avantages matrimoniaux est indépendant des éventuels torts des conjoints dans la séparation ;
  • il met fin à l’incertitude sur la composition des patrimoines des époux après divorce, le sort des donations et avantages matrimoniaux étant, pour l’essentiel, fixé à ce moment.

Une proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille propose d’étendre les cas d’ingratitude qui s’appliquent en cas de donation entre vifs (C. civ. art. 955) au droit des régimes matrimoniaux. L’objectif est d’empêcher la personne qui a commis des violences sur son conjoint de bénéficier des avantages matrimoniaux qui prennent effet au décès de l’un des époux et que son conjoint a pu lui consentir (Texte n° 266 (2023-2024) transmis au Sénat le 18-1-2024).

Donations entre époux

Les règles suivantes s’appliquent aux donations effectuées depuis le 1er janvier 2005.

Le divorce est sans incidence sur les donations de biens présents (C. civ. art. 265, al. 1). En conséquence (C. civ. art. 1096) :

  • Les donations entre époux qui ont pris effet pendant le mariage sont obligatoirement maintenues ;
  • Les donations entre époux qui n’ont pas pris effet pendant le mariage restent librement révocables. Sont concernées au premier chef les donations à terme (le terme étant le décès du donateur), cas en particulier de la réversion d’usufruit sur la tête du conjoint survivant.
  • Pour plus de précisions, notamment sur la clause de révocation en cas de divorce, nous consulter
  • Les donations au dernier vivant sont révoquées de plein droit par le divorce. Toutefois, l’époux qui a consenti la donation peut renoncer au bénéfice de la révocation automatique (ce qui est franchement déconseillé) ; il doit alors faire constater sa décision dans la convention de divorce dans le cas d’un divorce par consentement mutuel sans juge, ou par le juge au moment du divorce dans les autres cas de divorce (C. civ. art. 265, al. 2).
Avantages matrimoniaux

Les avantages matrimoniaux qui ont produit effet au cours du mariage sont maintenus en dépit du prononcé du divorce (C. civ. art. 265, al. 1).

Ce sera le cas, par exemple :

  • si les époux ont adopté un régime de communauté universelle, puisque les biens sont tous devenus des biens communs dès l’adoption du régime ;
  • s’il a été prévu une clause d’apport en communauté sans contrepartie.

Par exception, les époux peuvent reprendre les biens qu’ils ont apportés à la communauté si le contrat de mariage le prévoit (C. civ. art. 265, al. 3 ; n° 4605) – clause dite « alsacienne », courante en cas de communauté universelle.

Le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux (C. civ. art. 265, al. 2). Cette disposition vise tous les avantages matrimoniaux qui n’ont pas commencé à produire effet au moment du divorce. Tel est le cas de la clause de préciput, de la clause de prélèvement moyennant indemnité ou de la clause d’attribution intégrale de la communauté au conjoint survivant (généralement liée à l’adoption d’une communauté universelle). De même, la clause d’exclusion des biens professionnels pour le calcul de la créance de participation ne joue pas en cas de divorce, dès lors qu’elle génère un avantage matrimonial qui prend effet à la dissolution du régime (Cass. 1e civ. 18-12-2019 n° 18-26.337 FS-PBI : BPAT 2/20 inf. 53 note G. Yildirim ; Cass. 1e civ. 31-3-2021 n° 19-25.903 F-D : BPAT 3/21 inf. 106, AJ fam. 2021 p. 442 note P. Hilt ; Cass. 1e civ. 15-12-2021 n° 20-15.693 F-D). Dans cette dernière hypothèse, la solution est néanmoins critiquable en ce qu’elle aboutit à priver d’effet une clause du contrat de mariage censée s’appliquer justement pour le cas du divorce (en ce sens, Q. Guiguet-Schielé, L’avantage matrimonial révocable en participation aux acquêts : Dalloz Actualité 23-1-2020 ; G. Yildirim précitée ; en sens contraire, P. Hilt précité).

Si la révocation opère en principe de plein droit, l’époux qui a consenti l’avantage matrimonial ou la donation peut toutefois renoncer au bénéfice de la révocation automatique. Il doit alors faire constater sa décision par le juge au moment du divorce ou, pour le divorce contractuel, dans la convention de divorce (C. civ. art. 265, al. 2). En cas de révocation par divorce de l’avantage matrimonial constitué par la clause d’exclusion des biens professionnels, l’on imagine toutefois difficilement l’époux qui a consenti cet avantage à son ex-conjoint renoncer à cette révocation, même si la Cour de cassation ne manque pas de rappeler cette possibilité (voir Cass. 1e civ. 31-3-2021 n° 19-25.903 F-D et Cass. 1e civ. 15-12-2021 n° 20-15.693 F-D précitées).

Précisions : À la suite de la décision du 18 décembre 2019 précitée, des tentatives de sauvetage de la clause d’exclusion des biens professionnels ont été amorcées. . À ce jour, aucun aménagement législatif n’a toutefois été apporté, mais une proposition de loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille se propose d’y remédier en complétant l’article 265 de l’alinéa suivant : « La clause d’exclusion des biens professionnels du calcul de la créance de participation ne constitue pas un avantage matrimonial révoqué de plein droit en cas de divorce » (Texte n° 266 (2023-2024) transmis au Sénat le 18-1-2024).

Questions

Quelle différence entre divorce par consentement mutuel et divorce par acceptation du principe de la rupture ?

une erreur classique consiste à confondre divorce par consentement mutuel et divorce par acceptation du principe de la rupture. Il est vrai que ces deux types de divorce ont en commun de ne pouvoir être prononcés que si les époux s’entendent pour divorcer. Toutefois, le premier se distingue du second en ce que l’accord de volonté, plutôt que de se limiter à la décision de divorcer, s’étend aussi aux conséquences du divorce qui sont réglées conventionnellement par les époux. De surcroît, le divorce par consentement mutuel est en principe prononcé sans passage devant le juge, contrairement au divorce par acceptation du principe de la rupture

A-t-on le droit de tromper en étant marié ?

La devise de Loysel « En mariage il trompe qui peut » signifierait que l’époux a le droit d’être infidèle s’il le fait suffisamment habilement pour ne pas être démasqué.

Il n’en est rien, bien entendu. D’une part, l’adage signifie en réalité que le dol n’est pas cause de nullité du mariage et d’autre part, l’infidélité reste une faute susceptible d’être invoquée pour obtenir un divorce pour faute.

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