Ordonnance de protection : comment l’obtenir ou se défendre ?

Table des matières

Contexte

La lutte contre les violences intrafamiliales s’est intensifiée ces dernières années. Le législateur a notamment :

  • renforcé les ordonnances de protection (Loi 2019-1480 du 28-12-2019) ;
  • créé ou aménagé de nouveaux dispositifs pour lutter contre les violences au sein de la famille (Loi 2020-936 du 30-7-2020) ;
  • créé une aide financière d’urgence sous forme de prêt sans intérêt ou d’une aide non remboursable (Loi 2023-140 du 28-2-2023 : BPAT 3/23 inf. 164-18 ; Décrets 2023-1088 et 2023-1089 du 24-11-2023 : BPAT 1/24 inf. 56-4) ;
  • créé des pôles spécialisés dans les juridictions au sein desquels des magistrats coordinateurs seront chargés de mettre en place des circuits de traitement appropriés par les juges civil et pénal appelés à connaître des faits de violence et d’assurer le suivi des ordonnances de protection (COJ art. R 212-62-1 s. créés par décret 2023-1077 du 23-11-2023 ; Circ. JUSB2325493D du 24-11-2023 : BPAT 1/24 inf. 56-3).

L’ordonnance de protection remplace l’ancienne procédure de référé-violence figurant à l’alinéa 3 de l’article 220-1 du code civil (le référé-violence est ainsi abrogé à compter du 1er oct. 2010).

Fondement juridique de l’ordonnance de protection

  • Loi initiale (loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes) qui crée les articles 515-9 et suivants du code civil
  • Loi 2024-536 du 13-6-2024 : Nouvelle ordonnance provisoire de protection immédiate et ajustements de l’ordonnance de protection
  • Cadre procédural de l’ordonnance de protection. – Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 28 décembre 2019 et des décrets d’application du 27 mai et 3 juillet 2020, la procédure pour obtenir une ordonnance de protection figure aux articles 1136-3 à 1136-15 du code de procédure civile (L. no 2019-1480 du 28 déc. 2019, JO 29 déc. –Décr. no 2020-636 du 27 mai 2020, JO 28 mai. –Décr. no 2020-841 du 3 juill. 2020, JO 4 juill.).

Article 515-9 code civil

“Lorsque les violences exercées au sein du couple, y compris lorsqu’il n’y a pas de cohabitation, ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin, y compris lorsqu’il n’y a jamais eu de cohabitation, mettent en danger la personne qui en est victime ou un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection.”

Article 515-11 code civil

“L’ordonnance de protection est délivrée, par le juge aux affaires familiales, dans un délai maximal de six jours à compter de la fixation de la date de l’audience, s’il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables, y compris lorsqu’il n’y a pas de cohabitation ou qu’il n’y a jamais eu de cohabitation, la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés. 

Champ d’application de l’ordonnance de protection : conditions relatives aux parties

Lorsque les violences exercées au sein du couple ou par un « ex » mettent en danger la personne qui en est victime ou un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence une ordonnance de protection (C. civ. art. 515-9).

Son champ d’application est large :

  • Violences : Toutes les violences physiques ou psychologiques sont visées.
  • Auteur des violences : autre personne au sein du couple, un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin, peu importe qu’il yait cohabitation. Les violences sont prises en compte au sein de tous les couples : avec ou sans cohabitation ; mariés, pacsés ou vivant en concubinage ; actuels ou séparés.
  • Bénéficiaire de la protection : Tous les enfants issus ou non du couple sont protégés, ce qui permet de tenir compte de l’hypothèse des familles recomposées. Mais uniquement si le danger est engendré par le partenaire de couple. Les violences entre frères et soeurs ne sont pas concernées.

Quelques précisions :

  • L’ordonnance de protection peut être prise si seul un ou les enfants sont en danger sans que l’autre parent le soit également.
  • La notion de couple s’entend en dehors du critère de cohabitation.
  • La délivrance d’une ordonnance de protection n’est pas conditionnée à un dépôt de plainte préalable (C. civ. art. 515-10).

Conditions d’ouverture / Éléments à caractériser

Deux éléments , c’est à dire deux conditions cumulatives (Cass. 1e civ. 13-2-2020 n° 19-22.192 F-D) sont à caractériser pour qu’une ordonnance de protection soit prononcée (C. civ. art. 515-11) :

  1. La vraisemblance de violences
  2. Un danger

Autrement dit, qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables

  • la commission des faits de violence allégués
  • ET le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés

    Il suffit que, au vu des éléments produits, ces deux éléments paraissent vraisemblables. La preuve des violences n’a pas à être rapportée. Il faut seulement qu’il existe des raisons sérieuses de les considérer comme crédibles.

    L’appréciation de ces éléments relève du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. 1e civ. 5-10-2016 n° 15-24.180 F-PB ; Cass. 1e civ. 10-2-2021 n° 19-22.793 F-P).

    La première condition est très souvent remplie puisque le juge n’a qu’un contrôle lointain. C’est sur la seconde condition – le danger – que les juges du fond « contrebalancent » l’allégement de la preuve des violences commises. En effet, la preuve du danger apparaît liée à celle des violences. Autrement dit, cette seconde condition apparaît à la lecture de la jurisprudence que j’ai consultée déterminante dans le débat sur l’ordonnance de protection.

    Les types de Violences physiques ou psychologiques

    Violences physiques

    Violences psychologiques

    À s’en tenir à la définition communément admise des violences psychologiques, les violences matérielles (dégradations volontaires telles que le véhicule de la victime par exemple) ou économiques (par exemple, l’interdiction faite à la victime de travailler) peuvent être de nature à provoquer une sérieuse émotion. De la même manière, le fait de confisquer des documents administratifs tels qu’une pièce d’identité constitue également une violence psychologique. 

    Simple menace

    une simple menace est considérée comme un fait de violence par l’article 222-18-3 du code pénal.

    Harcèlement moral

    le harcèlement moral dans les relations entre conjoints, concubins ou partenaires liés par un pacs (ou d’ex-conjoints ou concubins ou partenaires) à l’article 222-33-2-1 du code pénal. La prise en compte du harcèlement moral permettrait ainsi de mieux appréhender les violences au sein des couples lorsqu’il existe une domination de l’un des membres du couple sur l’autre qui le met dans une situation de dépendance affective, sociale et économique en lui faisant perdre tout libre arbitre

    Violences vraisemblables

    Des violences suspectées. – L’article 515-11, alinéa 1er, du code civil, prévoit que le juge doit apprécier « au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, s’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violences allégués […] ». Il suffit donc que les violences alléguées soient vraisemblables, donc apparentes ou plausibles.

    Ce seuil allégé ne constitue pas une présomption légale de culpabilité ou une présomption sur la vraisemblance des violences et de la situation de danger.

    la Cour de cassation a pose comme principe que la seule vraisemblance de faits des violences allégués et du danger encouru suffit à permettre la délivrance d’une ordonnance de protection et que cette vraisemblance est soumise à l’appréciation souveraine des juges du fond (Civ. 1re, 5 oct. 2016, no 15-24.180). En d’autres termes, le critère à retenir pour le juge aux affaires familiales est donc celui de la vraisemblance (V. en ce sens, A. SANNIER, sous Civ. 1re, 5 oct. 2016, AJ fam. 2016. 537 ), ce qui emporte comme conséquence que le juge n’est pas tenu de s’assurer que les violences sont d’ores et déjà établies.

    Violences susceptibles de mettre en danger la victime

    Quels éléments de preuve rapporter ?

    • Des certificats médicaux peuvent être jugés suffisants.
    • Le témoignage de l’enfant du couple a été admis dès lors qu’il est produit dans l’instance qui tend non au divorce mais à la protection d’un conjoint victime de violence (CA Bordeaux 16-1-2013 n° 11/06198 ; CA Caen 22-9-2016 n° 16/01543).
    • un certificat médical,
    • l’audition de la victime supposée par les services de gendarmerie et des attestations (Pau, 30 nov. 2010, 2e ch., sect. 2, RG no 10/03890
    • l’importance des attestations produites dans la preuve de la vraisemblance des faits de violence [Paris, pôle 3, ch. 2, 15 oct. 2013, RG no 13474], surtout lorsque, comme dans l’arrêt rendu par la cour d’appel de Bordeaux le 16 janvier 2013 [ch. 6, RG no 11/06198], le témoignage d’un descendant est recevable dans le cadre d’une instance d’ordonnance de protection car il ne tendrait qu’à la protection d’un conjoint victime de la violence de la part de l’autre conjoint. – Dans le même sens, V. Caen, 3e ch. civ., 22 sept. 2016, RG no 16/01543) ;
    • l’intervention des forces de l’ordre au domicile des époux
    • les déclarations des enfants (Limoges, 14 mars 2011, RG no 10/01718) ;
    • des mains courantes,
    • le dépôt d’une plainte,
    • le compte-rendu du service des urgences de l’hôpital,
    • l’attestation d’une psychologue et des attestations de témoins (Paris, 16 juin 2011, RG no 11/05125) 
    • un procès-verbal d’audition, un certificat médical et une attestation rédigée par une association d’aide aux victimes (Paris, 22 juill. 2011, RG no 11/11170).
    • le témoignage des associations qui peuvent décrire le choc émotionnel en recevant les victimes ou encore témoigner du harcèlement de l’auteur des violences tantôt parce qu’il ne cesse de téléphoner pour tenter de retrouver sa victime, tantôt lorsqu’il connaît l’adresse du foyer d’hébergement qui accueille la victime, et crée des incidents plus ou moins graves d’ailleurs

    Saisine du juge

    Le juge compétent est le juge aux affaires familiales. Si une procédure de divorce, de séparation de corps ou encore une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale est pendante, la demande de mesures de protection ainsi que les demandes de modification ou de mainlevée des mesures sont présentées devant le juge saisi de cette procédure. La demande est formée, instruite et jugée comme indiqué ci-après ; le juge statue par décision séparée (CPC art. 1136-13 et 1136-14).

    Le juge est saisi par le conjoint ou l’ex-conjoint victime de violences (avec ou sans avocat) ou, avec son accord, par le ministère public.

    La saisine s’opère par une requête remise ou adressée au greffe (CPC art. 1136-3 ; Cerfa n° 15458*05). Celle-ci doit exposer sommairement les motifs de la demande et comporter, en annexe, les pièces sur lesquelles elle est fondée. Ces exigences sont prescrites à peine de nullité. S’agissant d’une nullité pour vice de forme, elle ne sera prononcée qu’en présence d’un grief subi par celui qui l’invoque (Cass. 1e civ. 16-11-2022 n° 21-15.095 FS-B : BPAT 1/23 inf. 68-12).

    La victime qui sollicite l’autorisation de dissimuler son adresse fait élection de domicile chez son avocat ou le procureur de la République, qui doit alors communiquer sans délai l’adresse du demandeur au juge (CPC art. 1136-5).

    Pièces

    Solution. – La Cour de cassation qualifie la nullité sanctionnant l’absence d’annexion, à la requête aux fins de délivrance d’une ordonnance de protection , des pièces sur lesquelles la demande est fondée de nullité de forme qui ne peut être prononcée qu’à charge pour celui qui l’invoque de prouver le grief que lui cause une telle irrégularité.

    Impact. – C’est la première fois que la Cour de cassation tranche cette question pour l’ ordonnance de protection . La qualification retenue est conforme à sa jurisprudence en la matière.

    Cass. 1re civ., 16 nov. 2022, n° 21-15.095

    Comment déposer la requête en pratique ?

    Les requêtes aux fins d’ordonnance de protection sont déposées au SAUJ. Les agents du greffe central du pôle vont relever les dossiers dans la matinée, les enregistrent et les soumettent au magistrat de permanence.

    Dès la réception de la requête accompagnée des pièces et actes d’état civil requis, le juge aux affaires familiales de permanence rend, sans délai, une ordonnance fixant la date d’audience, suivant une organisation interne au service des affaires familiales prévoyant des créneaux d’urgence réservés sur les audiences de tous les cabinets pour chaque jour de la semaine, permettant ainsi de respecter le délai de six jours prévu par le législateur.

    Copie de cette ordonnance est notifiée à la partie demanderesse par le greffe central, par courriel adressé à son conseil et, à défaut d’être assisté ou représenté par un avocat, par courriel adressé au requérant lui-même.

    A défaut de courriel dans la requête, une remise en mains propres pourra être organisée au SAUJ par le greffe central du pôle.

    Schéma procédural

    Notification de la date d’audience

    Dès réception de la demande, le juge rend, sans délai, une ordonnance fixant la date de l’audience (C. civ. art. 515-10 ; CPC art. 1136-3). L’ordonnance est :

    • – portée à la connaissance du ministère public ;
    • – notifiée au demandeur par le greffe ;
    • – signifiée au défendeur à l’initiative du demandeur s’il a un avocat, du greffe dans le cas contraire ou encore du ministère public s’il est l’auteur de la requête. Cette signification doit intervenir dans les deux jours qui suivent l’ordonnance afin que le juge puisse, dans le respect du contradictoire, statuer dans le délai requis (CPC art. 515-11 et 1136-3).

    L’ordonnance peut aussi être notifiée par voie administrative en cas de danger grave et imminent pour la sécurité d’une personne concernée par une ordonnance de protection ou lorsqu’il n’existe pas d’autre moyen de notification.

    Procédure

    La procédure est orale et les parties peuvent se faire assister ou représenter par un avocat (CPC art. 1136-6).

    L’affaire est instruite et débattue en chambre du conseil, après avis du ministère public.

    Le juge peut, à tout moment, ordonner la comparution personnelle d’une partie, pour l’entendre séparément ou en présence de l’autre partie. Lors de l’audience, il procède à l’audition des parties. Il les entend séparément s’il le décide ou si l’une des parties le sollicite.

    Audience

    • Les parties doivent être présentes (article 1136-6 CPC)
    • Les parties sont entendues séparément à la demande du juge OU à la demande de l’une d’entre elles (article 1136-6 CPC). A défaut elles sont entendues ensemble

    Décision

    L’ordonnance de protection est délivrée dans un délai maximal de six jours à compter de la fixation de la date d’audience (C. civ. art. 515-11).

    Lorsqu’elle est justifiée par des violences mettant en danger un ou plusieurs enfants, le juge en informe, sans délai, le procureur de la République (C. civ. art. 515-11).

    L’ordonnance est exécutoire à titre provisoire sauf disposition contraire (CPC art. 1136-7).

    Rejet de la demande

    Le juge peut estimer, dans le cadre de son pouvoir souverain d’appréciation, qu’il n’y a pas lieu à une ordonnance de protection.

    Dans ce cas, si l’urgence le justifie ou si une partie en fait la demande, une passerelle lui permet de renvoyer l’affaire à une audience de fond afin qu’il soit statué sur les modalités de l’exercice de l’autorité parentale et la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant. Il fixe alors la date de l’audience (CPC art. 1136-15).

    Mesures pouvant être ordonnées

    Le juge prend les mesures qui sont limitativement énoncées par l’article 515-11 du Code civil (Cass. 1e civ. 13-7-2016 n° 14-26.203 F-PB). Il peut, à ce titre (C. civ. art. 515-11) :

    – interdire à l’ex ou au conjoint violent de recevoir ou de rencontrer les personnes qu’il désigne

    Le texte n’apporte aucune restriction quant aux personnes susceptibles d’être concernées par ces interdictions qui n’ont pas besoin d’être visées par le danger. Ces mesures d’interdiction sont une protection de la victime et non des personnes visées par l’interdiction. Le but est d’éviter que l’auteur des violences ne fasse pression et n’entre en contact avec sa victime par personnes interposées. Il n’y a donc pas à caractériser un éventuel danger les concernant.

    Il peut s’agir bien sûr de la victime.

    La mesure a aussi été appliquée pour le nouveau compagnon de la victime ou l’assistante maternelle de l’enfant du couple (TGI Strasbourg 24-7-2014 n° 14/03268 ; TGI Strasbourg 4-4-2014 n° 14/01562). Lorsque le juge interdit au conjoint violent de rencontrer le conjoint victime, il peut prononcer une interdiction de se rapprocher de la victime à moins d’une certaine distance qu’il fixe et ordonner la mise en place d’un dispositif électronique mobile antirapprochement permettant à tout moment de signaler que le conjoint violent ne respecte pas cette distance. Ce dispositif n’est possible qu’avec le consentement des deux parties. En cas de refus de la part du conjoint violent, le juge en avise immédiatement le procureur de la République (C. civ. art. 515-11-1) ;

    Une ordonnance de protection peut interdire de voir l’enfant commun pour protéger la mère (Cass. 1e civ. 23-5-2024 n° 22-22.600 FS-B). Une ordonnance de protection peut interdire à l’auteur de violences à l’égard de son conjoint ou ex de prendre contact avec leur enfant commun en dehors des droits de visite sans avoir à se prononcer sur l’existence d’un danger pour l’enfant. Notons que la relation parent-enfant est néanmoins préservée puisque l’ordonnance réserve l’hypothèse des éventuels droits de visite du parent. Le JAF peut prononcer de telles interdictions sans avoir à se prononcer sur l’existence d’un danger encouru par l’enfant. Il suffit qu’il ait constaté l’existence de raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables les violences alléguées et le danger auquel était exposée la demanderesse.

    En sens contraire (solution infodnée selon moi) : La mesure a en revanche été refusée pour les enfants majeurs du couple (TGI Strasbourg 12-6-2014 n° 14/02636).

    – interdire à l’ex ou au conjoint violent de se rendre dans certains lieux qu’il désigne, dans lesquels se trouve habituellement la victime ;

    – interdire à l’ex ou au conjoint violent de détenir ou de porter une arme.

    Dans le cas où il lui interdit le contact de certaines personnes, le juge doit spécialement motiver sa décision s’il ne lui interdit pas la détention ou le port de son arme ;

    – ordonner à l’ex ou au conjoint violent de remettre les armes en sa possession à la police ou gendarmerie ;

    attribuer à la victime la jouissance de l’animal de compagnie du foyer

    Désormais, une ordonnance de protection peut attribuer à la victime la jouissance de l’animal de compagnie du foyer (C. civ. art. 515-11 3o bis nouveau)

    – proposer à l’ex ou au conjoint violent une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes.

    En cas de refus, le juge en avise immédiatement le procureur de la République

    statuer sur la résidence séparée des époux (ou partenaires de Pacs ou concubins)

    L’attribution de la jouissance du logement est, sauf circonstances particulières, de droit au profit du conjoint victime, y compris s’il a bénéficié d’un hébergement d’urgence. Le juge statue par décision spécialement motivée. Le conjoint violent expulsé ne bénéficie pas des dispositions protectrices du logement tenant notamment à la trêve hivernale (dispositions prévues par C. exécution art. L 412-8 et CCH art. L 613-1) ;

    statuer sur les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement, le conjoint violent pouvant être condamné à les assumer ;

    se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale,

    c’est-à-dire le droit de visite et d’hébergement et la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. Le juge est notamment compétent pour prévoir que le droit de visite ou la remise de l’enfant se fera dans un espace de rencontre ou en présence d’un tiers de confiance. Il doit même spécialement motiver sa décision de ne pas ordonner de telles modalités de sécurisation s’il interdit par ailleurs au conjoint violent de recevoir ou de rencontrer certaines personnes ;

    se prononcer, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage ou l’aide matérielle au sens de l’article 515-4 pour les partenaires de Pacs ;

    autoriser la partie demanderesse à dissimuler son adresse

    La partie demanderesse peut élire domicile chez son avocat ou auprès du procureur de la République pour les instances civiles dans lesquelles elle est partie et chez une personne morale qualifiée (notamment une association) pour les besoins de la vie courante. La victime autorisée à dissimuler son adresse est dispensée d’informer l’autre parent d’un changement de résidence (C. civ. art. 373-2 modifié par loi 2024-233 du 18-3-2024) ;

    afin de renforcer l’effectivité de l’autorisation de la victime de dissimuler son domicile ou sa résidence, son adresse peut être masquée sur les listes électorales (C. électoral art. L 37 modifié). Pour ce faire, le procureur de la République, avec l’accord de la victime, informe le maire et le représentant de l’État dans le département de la mesure de dissimulation de domicile prise par l’ordonnance de protection afin que l’adresse de la victime ne puisse pas être communiquée à des tiers (C. civ. art. 515-11 modifié).

    prononcer à titre provisoire l’admission de la victime à l’aide juridictionnelle

    Durée des mesures

    L’ordonnance fixe la durée des mesures, qui est au plus de 12 mois (6 auparavant) à compter de la notification de l’ordonnance. ((C. civ. art. 515-12).

    Elle a été doublée puisqu’elle était de 6 mois. Le délai peut être prolongé dans les mêmes conditions qu’auparavant, à savoir si une demande en divorce, en séparation de corps ou relative à l’exercice de l’autorité parentale a été déposée.L’allongement de la durée de l’ordonnance de protection à 12 mois vise spécifiquement les victimes qui, n’étant pas mariées ou n’ayant pas d’enfant, ne bénéficient pas de la prorogation par l’introduction d’une demande en divorce ou en fixation des modalités d’exercice de l’autorité parentale. Cela leur octroie un temps plus long pour organiser leur séparation.

    A défaut d’indication, les mesures prennent fin six mois après leur notification (C. civ. art. 515-12 ; CPC art. 1136-7) (inchangé).

    Modification, mainlevée ou prolongement par le juge

    Le juge aux affaires familiales peut, à tout moment, modifier, supprimer ou ajouter des mesures ou encore suspendre temporairement certaines obligations faites au conjoint violent. Il statue ainsi à la demande du ministère public, d’une des parties, ou après avoir fait procéder à toute mesure d’instruction utile, et après avoir invité chacune d’entre elles à s’exprimer (C. civ. art. 515-12).

    L’application des mesures de protection peut être prolongée au-delà des 12 mois si, durant ce délai, a été déposée une demande en divorce ou en séparation de corps ou encore une demande relative à l’exercice de l’autorité parentale (C. civ. art. 515-12).

    Elle est prolongée dans les mêmes conditions si une ordonnance de protection est prononcée alors qu’est en cours une procédure de divorce, de séparation de corps ou une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale (CPC art. 1136-13 et 1136-14).

    Dans ces hypothèses, les mesures de l’ordonnance de protection s’appliquent (prendront fin), selon le cas :

    • jusqu’à ce que le jugement de divorce ou de séparation de corps soit passé en force de chose jugée, à moins que le juge du divorce n’en décide autrement. Toutefois, les mesures relatives à la résidence des conjoints, à l’exercice de l’autorité parentale (droit de visite et d’hébergement et contribution à l’entretien et l’éducation) et à la contribution aux charges du mariage cessent de produire leurs effets à compter de la notification de l’ordonnance sur mesures provisoires (ordonnance de non-conciliation avant le 1-1-2021) puisque les mesures provisoires s’y substituent (CPC art. 1136-13) ;
    • jusqu’à ce que la décision statuant sur l’exercice de l’autorité parentale soit passée en force de chose jugée, à moins que le juge saisi de cette demande n’en décide autrement. En outre, la décision prise à titre provisoire dans le cadre de cette procédure et statuant sur l’exercice de l’autorité parentale et la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants prend le pas sur les dispositions prévues par l’ordonnance de protection (CPC art. 1136-14).

    Recours contre l’ordonnance de protection

    On se rapproche de la procédure pénale ici.

    Appel

    L’ordonnance de protection, qu’elle soit acceptée (partiellement ou intégralement) ou refusée, est susceptible d’appel dans un délai de 15 jours suivant sa notification (CPC art. 1136-11).

    Modification

    Les intéressés peuvent, par ailleurs, présenter une demande de mainlevée, de modification ou de suspension temporaire de tout ou partie des mesures prises (CPC art. 1136-12).

    L’ordonnance provisoire de protection immédiate (non-contradictoire)

    l’ordonnance provisoire de protection immédiate permet la mise en place d’une protection dès que le JAF est saisi d’une demande d’ordonnance de protection.

    Lorsqu’une demande d’ordonnance de protection est déposée, le ministère public peut, avec l’accord de la personne en danger, demander une ordonnance provisoire de protection immédiate. Le JAF doit alors statuer dans le délai de 24 h à compter de sa saisine (C. civ. art. 515-13-1 nouveau).

    Procédure non-contradictoire

    Le juge statue au vu des « seuls éléments joints à la requête ». L’audience n’est donc pas contradictoire. Alors que, lors de l’instance en demande d’une ordonnance de protection, le JAF entend le demandeur, le défendeur et le ministère public.

    Cela explique que les mesures susceptibles d’être prises par une ordonnance provisoire sont plus restreintes.

    Les deux cas

    Deux situations justifient la délivrance d’une telle ordonnance provisoire.

    Cas 1 : Danger grave et immédiat

    L’octroi de l’ordonnance provisoire est subordonné à un critère supplémentaire qui est la situation d’urgence et d’une particulière gravité : le danger doit être grave et immédiat.

    Le JAF délivre l’ordonnance provisoire s’il estime, au vu des seuls éléments joints à la requête, qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger grave et immédiat auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés.

    Mesures limitées de l’ordonnance provisoire

    Le JAF peut, par cette ordonnance, prendre certaines des mesures possibles dans une ordonnance de protection (C. civ. art. 515-13-1 nouveau), à savoir :

    • interdire à la partie défenderesse de recevoir ou rencontrer certaines personnes ou encore d’entrer en relation avec elles ; lui interdire de se rendre dans certains lieux fréquentés par la partie demanderesse (C. civ. art. 515-11, 1 et 1 bis) ;
    • interdire à la partie défenderesse de détenir ou de porter une arme ; lui ordonner de remettre ses armes à la police ou la gendarmerie (C. civ. art. 515-11, 2 et 2 bis) ;
    • suspendre le droit de visite et d’hébergement de l’auteur des violences (C. civ. art. 515-11, 5o) ;
    • autoriser la victime à dissimuler son domicile ou sa résidence (C. civ. art. 515-11 6o et 6o bis).

    Lorsque l’ordonnance provisoire prescrit une mesure d’interdiction d’entrée en contact avec la victime, le procureur peut mettre en place un dispositif de téléprotection (téléphone grave danger). La durée du dispositif, en principe de 6 mois renouvelables, peut être réduite par le procureur de la République si l’ordonnance provisoire n’est pas suivie d’une ordonnance de protection (CPP art. 41-3-1 modifié).

    Cas 2 Risque de mariage forcé

    Une ordonnance provisoire de protection immédiate peut également être prise pour protéger la personne majeure menacée de mariage forcé (C. civ. art. 515-13 modifié).

    La procédure et la durée de la mesure sont identiques à celles déjà énoncées.

    Mesures limitées à l’ordonnance provisoire

    Le JAF peut prendre les mêmes mesures que celles prévues en cas de danger. Il peut en outre ordonner une interdiction temporaire de sortie du territoire de la personne menacée, à sa demande. Cette dernière est alors inscrite au fichier des personnes recherchées.

    Absence d’autonomie de l’ordonnance provisoire de protection immédiate non-contradictoire

    L’ordonnance provisoire de protection immédiate n’est pas une procédure autonome, elle ne peut être engagée qu’associée à une demande d’ordonnance de protection. Par ailleurs, elle est conduite par le ministère public qui a seul la qualité pour agir. Mais il doit agir avec l’accord du demandeur au bénéfice d’une ordonnance de protection.

    Fin de l’ordonnance provisoire

    L’ordonnance provisoire prend fin à compter de la décision statuant sur la demande d’ordonnance de protection ou qui accueille une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident mettant fin à l’instance.

    Le délai d’application de l’ordonnance provisoire est bref, au maximum 6 jours, puisque l’ordonnance provisoire n’a vocation qu’à couvrir le laps de temps laissé au JAF pour statuer sur l’ordonnance de protection. L’octroi d’une ordonnance provisoire ne lie pas le JAF statuant sur la demande d’ordonnance de protection.

    C’est quoi le problème avec l’ordonnance de protection ?

    C’est toute l’ambiguïté de cette ordonnance de protection. Effectivement, le juge aux affaires familiales est un juge mi-civil, mi-pénal mais sans disposer de moyens d’investigation rapides comme, par exemple, ceux accordés aux juges des enfants. Il reste dans le cadre de cette procédure un juge civil qui doit respecter les règles d’un procès civil, à savoir que c’est à la partie demanderesse d’apporter la preuve des éléments au soutien de ses prétentions.

    Le ministère public, qui est dans la majeure partie des cas partie jointe, se contente de donner un avis qui n’est pas toujours étayé ou qui indique que la procédure pénale est en cours. Manifestement, la crainte de se faire instrumentaliser constitue assurément un frein dans l’intervention du parquet.

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