La protection contre les clauses abusives s’applique aux contrats conclus entre professionnels et non-professionnels (C. consom. art. L 212-2). Est un non-professionnel toute personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles (C. consom. art. liminaire).
Comment déterminer le caractère professionnel : l’objet social
L’activité professionnelle d’une SCI est déterminée au regard de son objet social.
Si la Cour de cassation ne s’est encore jamais expressément prononcée en ce sens pour l’application des textes relatifs au cautionnement, c’est bien ainsi qu’elle procède pour déterminer si une SCI est susceptible de bénéficier du droit de rétractation ouvert à l’acquéreur non professionnel d’un bien immobilier par l’article L 271-1 du Code de la construction et de l’habitation (Cass. 3e civ. 24-10-2012 no 11-18.774 FS-PBR : RJDA 1/13 no 26).
En matière de cautionnement, la cour d’appel de Paris s’est aussi fondée sur ce critère, écartant la qualité de créancier professionnel pour une SARL bailleresse de locaux commerciaux dès lors que la location n’entrait pas directement dans son objet social et que, si la SARL avait d’autres locataires pour des locaux qu’elle n’utilisait pas, cela ne faisait pas pour autant d’elle un bailleur professionnel même à titre accessoire (CA Paris 14-2-2013 no 12/02595 : RJDA 6/13 no 547).
Le professionnel s’entend de celui dont le droit est né dans l’exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n’est pas principale. (CA Versailles 18-1-2024 no 21/04746, SCI Dvorah patrimoine c/ X)
Charge de la preuve
La charge de la preuve de la qualité de professionnel repose sur celui qui l’invoque (Cass. com. 15-11-2017 no 16-13.532 F-D : RJDA 2/18 no 176).
Il y a une absence de présomption de la qualité de créancier professionnel à l’égard d’une société civile immobilière (Cass. com. 15-11-2017 précité).
Cas dans lesquels la SCI est un professionnel
Une société civile immobilière agit en qualité de professionnel, et ne peut donc pas invoquer à son bénéfice la réglementation des clauses abusives, lorsqu’elle souscrit des prêts immobiliers pour financer l’acquisition d’immeubles conformément à son objet. (Cass. 1re civ., 28 juin 2023, n° 22-13.969)
Une société civile immobilière (SCI) agit en qualité de professionnel lorsqu’elle souscrit des prêts immobiliers pour financer l’acquisition d’immeubles conformément à son objet. Par suite, une SCI ayant souscrit deux prêts immobiliers libellés en francs suisses afin d’acquérir des immeubles à des fins d’investissement locatif était réputée agir conformément à son objet et elle ne pouvait pas invoquer à son bénéfice le caractère abusif de certaines clauses des contrats de prêt.
Cette décision de la cour d’appel de Versailles est dans la ligne de la jurisprudence de la Cour de cassation en ce qui concerne la définition du créancier professionnel (notamment, Cass. 1e civ. 1-10-2014 no 13-16.273 F-D : RJDA 3/15 no 217 ; Cass. com. 21-6-2023 no 21-24.691 F-B : BRDA 15-16/23 inf. 12), Ajoutons qu’une SCI ayant consenti un bail commercial est susceptible d’être qualifiée de créancier professionnel, même si elle n’exerce pas d’activité commerciale (Cass. 3e civ. 9-3-2011 no 10-11.011 FS-D : RJDA 11/11 no 958).
Cas dans lesquels la SCI est un non-professionnel
Il a été jugé qu’une SCI ayant pour objet social l’investissement et la gestion immobiliers, et notamment la mise en location d’immeubles dont elle avait fait l’acquisition, n’était pas intervenue à titre professionnel à l’occasion de la conclusion d’un contrat de maîtrise d’œuvre avec un architecte en vue de la construction d’un immeuble dès lors que le domaine de la construction fait appel à des connaissances ainsi qu’à des compétences techniques spécifiques distinctes de celles exigées par la seule gestion immobilière (Cass. 3• civ. 7-11-2019 n° 18-23.259).
Le cas des baux commerciaux
Les décisions ci-après ont toutes été rendues à propos de SCI ayant consenti des baux commerciaux.
La qualité de créancier professionnel a ainsi été reconnue à une SCI dès lors que son objet était notamment l’exploitation à bail et la location de tous immeubles, que le cautionnement donné pour garantir le bail se rattachait directement à cet objet social et que la créance de loyers était bien née de la réalisation de cet objet ; il importait donc peu que la SCI ne soit pas marchand de biens, qu’elle ne soit propriétaire que d’un seul immeuble, qu’elle ne soit pas assujettie à l’impôt sur les sociétés et qu’elle soit constituée essentiellement de membres d’une seule famille (CA Paris 15-1-2014 no 12/01489).
En revanche,
- une cour d’appel a refusé de déduire la qualité de créancier professionnel du seul constat que l’objet de la SCI était de louer le local et que la créance invoquée était bien née de cette activité (CA Lyon 12-3-2013 no 12/02162).
- Cette qualité a également été écartée pour une SCI familiale constituée entre un père et son fils en vue d’exploiter un seul bien immobilier, soumise à l’impôt sur le revenu pour une activité de nature civile, dès lors que la créance de loyers garantie n’était pas née de l’exercice d’une profession ni en rapport direct avec une activité professionnelle (CA Paris 13-6-2014 no 13/10165).